Polina, jeune Ukrainienne de 21 ans, s’est réfugiée à Lille. Ses parents sont restés dans le pays en guerre et travaillent dans la centrale nucléaire, ciblée par les frappes militaires. Elle raconte son angoisse.
Voix affligée, yeux qui chassent les larmes salées. Polina Silina, 21 ans, vient de finir un appel avec sa famille qui habite à Énerhodar, en Ukraine. Ses parents travaillent à la centrale nucléaire de Zaporijjia. Elle ne lâche pas son smartphone. Sur son Télégram, figurent les images des immeubles brûlés. Elle craint que le prochain ne soit celui de ses parents. Polina a réussi de partir d’Ukraine, pour faire son année d’échange à Lille, à l’Institut supérieur de l’agronomie. Aujourd’hui, après des mois d’incertitude, sa mère a pris la décision de fuir elle-aussi.
Quelle a été l’impact de l’invasion russe sur la ville ?
« Après un mois, les Russes ont enfermé la ville et cela a provoqué un déficit alimentaire. Il y avait d’énormes files d’attente pour obtenir la nourriture chez les associations humanitaires russes. C’était comme si l’on était replongé dans l’Union soviétique. Il y a eu des coupures de réseau ukrainien, la fermeture des magasins. Les gens n’avaient plus d’espèces, ils vivaient de leurs économies… Ma mère a continué de se rendre au travail. Il y a eu une frappe sur la centrale et elle a été prise en otage avec les autres salariés pendant quelques heures. Parfois, ils devaient passer la nuit là-bas, car on ne les laissait pas partir.
Quelle est l’ambiance dans la ville actuellement ?
« La ville est désertée. Avant, elle comptait 60 000 habitants, maintenant il n’y en a plus que 5000. Il ne reste que les seniors et les hommes, ces derniers n’ont pas le droit de quitter le pays. Il y a eu des frappes sur les bâtiments, les magasins. C’est difficile moralement, tu ne sais jamais ce qui va tomber sur ta maison. La centrale a été frappée elle-aussi. La matière première a été atteinte, ce qui est très dangereux. Aujourd’hui, un réacteur nucléaire a été arrêté à cause de ces attaques. »
Que vont faire vos parents ?
« Jusqu’au dernier moment, ils ne voulaient pas partir. Ma mère a finalement décidé de quitter le pays. Elle essaie d’évacuer ma grand-mère pour partir en Allemagne. Mais elle doit trouver la bonne route. »