Du 19 au 29 septembre, Lille a accueilli la 24e édition du Festival international du court métrage. Rendez-vous très attendu de la rentrée, retour sur dix jours de compétition.
En se rendant à proximité du musée des Beaux-Arts ce 19 septembre, difficile de croire que son auditorium accueille la soirée d’ouverture d’un festival. Un rendez-vous confidentiel, accessible, semble t‑il, aux seuls élus qui ont eu leur place et quelques « happy few ». Connu en 2001 comme les « Rencontres Audiovisuelles », le rendez-vous devient le « Festival International du Court Métrage » trois ans plus tard. Voyageant de Roubaix à Tourcoing, en passant par Maubeuge ou encore Dunkerque, la cérémonie finit par poser ses valises dans la métropole lilloise en 2009. Une ville, des rencontres, un public, une compétition. Tous les ingrédients sont présents pour explorer le format court sous toutes ses formes.
Claude Barras, un homme animé
Que serait un festival sans invité d’honneur ? Cette année, le festival a misé sur Claude Barras, un invité de marque qui leur a fait l’honneur d’organiser une masterclass sur l’animation.
Après la vision de huit de ses courts-métrages, le réalisateur suisse est revenu sur sa carrière dans le monde de l’animation. « Comment vous est venue l’envie de faire du court-métrage d’animation », demande une étudiante en graphisme ? « En y réfléchissant, je pense que c’est lorsque j’étais enfant. Le dimanche après-midi, il y avait un programme télé suisse qui diffusait plusieurs courts-métrages. Ma mère m’a souvent dit que petit, j’étais très attaché à ce programme ». Une source d’inspiration anecdotique qui a façonné l’artiste d’aujourd’hui.
Au sujet de Ma vie de Courgette, Claude Barras est incapable d’expliquer le succès du film. « J’ai toujours été attiré par cette DA (dimension artistique) où les traits sont tirés et les yeux globuleux. Il y a un côté enfantin et Courgette en est l’apothéose ». Le film suit l’histoire d’un petit garçon qui évolue dans un orphelinat. Autour de lui gravitent Simon, Ahmed, Jujube, Alice, Béatrice et Camille qui eux-aussi, ont une histoire à raconter. « Il a clairement donné un coup de jeune au monde de l’animation. Il a changé le regard qu’on a sur la façon dont on parle aux enfants au cinéma », affirme son producteur. « Je ne sais pas trop quoi répondre à cela », plaisante son réalisateur.
Un moment d’échange qui s’est terminé avec la diffusion de son nouveau film « Sauvages », au Majestic de Lille. Une histoire touchante dans laquelle le cinéaste s’empare de la thématique de la déforestation avec comme témoin les Penans, un peuple autochtone vivant au cœur d’une forêt tropicale. « Ils vivent en harmonie avec les animaux et la nature », explique le réalisateur. « J’ai été plus qu’enchanté qu’ils aient pu monter les marches du festival de Cannes avec moi pour l’avant-première. À la fin du film, ils avaient les larmes aux yeux et m’ont avoué s’être sentis dans leur forêt. C’était ma plus belle récompense », a confié le réalisateur. La sortie en salle est prévue le 16 octobre prochain.
Le studio Anima, reflet de l’animation en République Tchèque
Le festival aspire à faire connaître des créations régionales mais aussi étrangères. Cette année, le studio Anima était mis à l’honneur. Marqué par la révolution numérique, ce studio tchèque, fondé en 1991 par Marcela et Milan Halousek, combine à la fois nouveauté liée à la révolution numérique tout en conservant l’aspect traditionnel de l’animation tchèque. Un exemple concret de cette ambivalence : la lampe de leur studio, clin d’œil à la lampe des studios Pixar.
Après la diffusion de quelques-uns de leurs courts-métrages, un échange a eu lieu entre le public, des producteurs, des réalisateurs et des chefs opérateurs tchèques, venus présenter leurs travaux pour le festival, mais également visiter les studios des écoles dans le Nord. « J’ai été frappé de voir tous les types de supports. On dirait que chaque plan est indépendant du scénario », explique une spectatrice interloquée. « Oui, c’est très marqué dans la production de films en République Tchèque », explique Ravin, producteur chez Anima. « L’histoire va moins diriger la réalisation des films. Ce sont les images qui sont vraiment au service de l’imagination ». Une chose semble les guider : le visuel d’abord, l’imagination ensuite, l’histoire après.
Et les grands gagnants sont…
Après dix jours de compétition, le festival s’est clôturé dimanche au théâtre Sébastopol. Une cérémonie placée sous le signe de la reconnaissance de nouveaux talents et de la diffusion de certains films primés durant le concours.
Cette année, c’est un jury de cinq professionnels de l’audiovisuel qui a élu les vainqueurs du Marathon du Court. Un challenge compétitif aux règles simples : 4 minutes maximum, un thème imposé et 48 heures pour le réaliser. Cette année, le thème était : « subir le supplice de Tantale », métaphore qui décrit une situation dans laquelle une personne est soumise à une torture, désirant quelque chose d’inatteignable. Sur les 36 films rendus, 8 ont été retenus. Des formats courts remplis de « sensibilité, authenticité et poésie », selon les dires du jury. La remise s’est poursuivie avec la compétition internationale. 31 films ont retenu l’attention du public, seuls jurés de cette compétition. « Nous avons mis en valeur la diversité du format court. Il y a des films documentaire, de fiction, d’animation, de prise de vue réelle et aussi expérimentaux », précise Sabine Costa, coordinatrice du festival.
Après les résultats, les spectateurs ont pu profiter de la diffusion de quelques films vainqueurs : « Car Wash », reflet des confidences de deux sœurs, « Noël » dont l’écho politique est étrangement actuel, « Papillon », nouveau chef-d’œuvre de Florence Miailhe, « Nova », histoire sur la nostalgie, « Les abeilles d’eau douce », film étudiant d’Emma Kanouté sur un premier amour, « Si j’avais deux cœurs », prix d’interprétation du festival du Court et « Incident », reportage sur le meurtre d’un homme noir tué par la police aux Etats-Unis. Des œuvres dévoilées durant le festival et qui seront rediffusées à l’Hybride durant le mois d’octobre.