Dans son dernier rapport, le GIEC a émis des pistes pour maintenir le réchauffement climatique en dessous d’1,5°C. Cet objectif suppose des bouleversements tellement radicaux que les préconisations en deviennent inatteignables, selon Grégory Derville.
Il nous reste trois ans. Trois ans au maximum pour stabiliser la courbe du réchauffement climatique en dessous d’1,5°C. « Il faudrait un coup de baguette magique pour y arriver. Les engagements qui sont pris actuellement nous amènent à plus de 3°C, ce qui rend déjà la planète non vivable à la fin du siècle » explique Gregory Derville, maître de conférences en écologie politique à l’université de Lille.
Dans le dernier volet de son 6e rapport sur les conséquences du réchauffement climatique d’avril 2022, le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) alerte sur l’urgence des actions à mettre en place : investir plus massivement dans des techniques décarbonées, bloquer les financements des énergies fossiles, améliorer le fonctionnement des puits de carbone… autant de pistes qui visent à diminuer les émissions de gaz à effet de serre entre 40% et 70% d’ici 2050.
Mais « une bonne partie des solutions préconisées ne sont même pas les plus pertinentes, regrette Gregory Derville, le verdissement de la société industrielle, la décarbonation d’énergies renouvelables… ce sont des solutions insuffisantes qui n’engagent pas un changement d’état radical qui est indispensable ».
Un rapport « pas assez brutal, presque angélique »
Un rapport final de près de 4000 pages qui n’est « pas assez brutal dans sa manière d’alerter sur les solutions et qui accorde encore trop d’importance aux solutions technologiques » pour le professeur d’écologie politique. « C’est un discours très rassurant qu’on a tous envie d’entendre, mais la réalité, c’est qu’on va morfler ».
Les solutions proposées dans le cadre de ce rapport n’insistent pas assez sur la nécessité d’un bouleversement sociétal et d’une prise de conscience urgente. Pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050, il est impératif d’opérer un changement radical de notre manière de vivre sur Terre.
Mais c’est un objectif difficile à atteindre selon les spécialistes. Il obligerait des actions immédiates sur le plan technologique, mais surtout sur le plan social. Si tous les pays du monde réduisaient leurs émissions de dioxyde de carbone de moitié d’ici 2030, nous pourrions atteindre la neutralité carbone en 2050 et limiter le réchauffement à 1,5°C. Cette solution serait « techniquement faisable, admet Gregory Derville, mais politiquement et socialement inaccessible ».