Après une première tentative de réforme freinée par la pandémie du Covid 19, le gouvernement revient à l’assaut des retraites en ce début d’année 2023. L’objectif principal de la réforme est simple : repousser l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans et augmenter le nombre de personnes qui vont devoir cotiser 43 annuités afin d’aider l’État à boucher le trou du système de retraites. Cette réforme, loin d’être une réforme d’équilibre, de justice ou de progrès, risque encore d’accroître les inégalités sur le territoire français.
Le gouvernement est unanime à ce sujet, il est hors de question d’affecter les pensions des retraités. Pourtant, on demande aux actifs de travailler toujours plus, de cotiser toujours plus sans solliciter le moindre effort des retraités. Alors qu’en réalité, le niveau de vie des retraités est bien supérieur à celui des actifs, les bénéficiaires du système de retraite sont en moyenne plus riches que ceux qui y contribuent. Selon le Conseil d’Orientation des Retraites (COR), en 2019, le niveau de vie des retraités était supérieur de 1,6% à celui des actifs, pour un revenu moyen annuel de 25 584 euros contre 25 190. De plus, l’économiste Maxime Sbaihi rappelle que le minimum vieillesse, déjà supérieure de 60% au RSA, a été relevé de 14% depuis 2017. N’importe quelle personne âgée de 65 ou plus ayant travaillé ou non, cotisée ou non, a un revenu garanti par l’Etat, c’est la seule classe d’âge qui possède cet avantage. Autres éléments importants, les CSG sont inférieures pour les retraités que pour les actifs alors que 70% du budget des cotisations servent à financer la retraite. La crise pandémique l’a concrètement montré, ce sont les jeunes actifs et les étudiants qui sont les classes les plus précaires.
Un choix électoral ?
Bien évidemment, si le gouvernement refuse de se mettre à dos les retraités, c’est parce qu’il incarne une grande part de l’électorat. La France vieillit très vite, et ses électeurs par la même occasion. Selon l’institut statistique Statista, 10% des Français sont âgés de plus de 75 ans en 2022. C’est la deuxième plus grande portion derrière les moins de 15 ans qui représentent presque 1⁄5 de la population. Les retraités équivalent pratiquement à ¼ de la population et le président de la République le sait pertinemment. Le résultat de ce fardeau démographique est que la nouvelle génération en paye le prix, des disparités se créent et un débat intergénérationnel est inexistant pour le moment. Précisons tout de même, que les acquis sociaux des actifs français sont considérables comparés à d’autres concitoyens européens. Si les Français souhaitent réellement éviter la retraite à l’âge de 64 ans, il faudra peut-être faire des concessions. La semaine de 35h de travail semble dérisoire à côté de nos voisins luxembourgeois qui travaillent 40h. Il est aussi important de reconnaître que la France possède l’un des plus jeunes âges de départ à la retraite d’Europe. En Allemagne, par exemple, les actifs doivent partir à 67 ans tandis que les Belges peuvent seulement cesser de travailler à 65 ans.
Le niveau de vie des retraités qui s’effrite
Même si selon le COR, le niveau des retraités demeure plus élevé que celui de l’ensemble de la population, il n’en reste pas moins affecté par les récentes crises. De nombreux facteurs ont également impacté le pouvoir d’achat des retraités ces dernières années. La démographie concerne aussi les plus âgés, de nombreux inactifs se retrouvent veuf et veuves et détiennent logiquement moins de revenus. On s’aperçoit aussi d’un appauvrissement patrimonial des retraités qui risquent d’encore de se détériorer avec la hausse des taux d’intérêt qui va nécessaire freiner les investissements. Mais, ce qui a le plus pesé sur le niveau de vie des seniors récemment, c’est le poids des prélèvements obligatoires. Selon nos confrères des Échos, ils ont augmenté de 3,1 points pendant la crise des subprimes jusqu’à 2014 en ciblant particulièrement l’impôt sur le revenu qui a crû de 2,1 points. La suppression de la première tranche d’imposition sur le revenu en 2015 n’améliorera pas pour autant le pouvoir d’achat des retraités, fortement compensés par l’accroissement des cotisations sociales et de la taxe d’habitation. La réforme des retraites reste donc un sujet délicat à aborder et il semble compliqué de satisfaire la globalité des citoyens qu’importent les changements.