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    La frilosité du gou­ver­ne­ment pour pan­théo­ni­ser la féministe Gisèle Halimi en raison de sa position pro-​FLN pendant la guerre d’Algérie pousse les mili­tantes de son asso­cia­tion à boycotter son propre hommage par le président de la République le 8 mars.

    Dans la journée du 2 mars, France Info révèle qu’Emmanuel Macron présidera un hommage national à l’avocate et militante féministe Gisèle Halimi (1927−2020) au Palais de Justice de Paris. La date du 8 mars n’a pas été sélec­tion­née par hasard, ce jour étant depuis une décision de l’ONU de 1977 la journée inter­na­tio­nale du droit des femmes.

    Née en Tunisie dans une famille juive séfarade, cette franco-​tunisienne fut la seule avocate signa­taire du manifeste des 343 femmes ayant eu recours à l’a­vor­te­ment, manifeste publié par le Nouvel Observateur en 1971. Un an plus tard, elle fut l’avocate des cinq femmes jugées pour pratique de l’a­vor­te­ment – une jeune fille mineure violée puis qui a avorté assistée par sa mère et trois autres femmes. Il s’agit du procès de Bobigny. Gisèle Halimi fait de l’au­dience une tribune féministe, appelant à la barre des per­son­na­li­tés telles que Simone de Beauvoir, Michel Rocard, Françoise Fabian ou Aimé Césaire, tous en soutien de la jeune fille accusée. Cette dernière est relaxée.

    Dans la foulée du soutien au manifeste des 343, Halimi et de Beauvoir fondent l’as­so­cia­tion « Choisir la cause des femmes ». Camouflet pour le président de la République : les mili­tantes de cette asso­cia­tion his­to­rique du féminisme français refusent de par­ti­ci­per à l’hommage de leur co-​fondatrice. Dans une lettre publique à l’at­ten­tion d’Emmanuel Macron publiée sur le site de Choisir le jour même, la pré­si­dente de l’as­so­cia­tion Violaine Lucas s’en explique. « Le choix que vous opérez en orga­ni­sant en dernière minute cet hommage national à la féministe Gisèle Halimi, ce 8 mars 2023, nous semble relever d’une ins­tru­men­ta­li­sa­tion politique. Elle ne trompera personne », écrit-​elle au président. Rejetant la réforme des retraites défendue par le gou­ver­ne­ment, Violaine Lucas écrit que Choisir s’en­ga­gera le jour de l’hommage dans un mouvement de « grève des femmes » opposé à la réforme. La pré­si­dente de l’as­so­cia­tion rappelle également qu’Emmanuel Macron n’a cessé de se « défausser derrière une série d’excuses destinées à ne pas rendre hommage à l’avocate aux combats radicaux : luttes féministe, sociale, anti­ca­pi­ta­liste, anti­co­lo­nia­liste, anti­ra­ciste, anti-​impérialiste, cause pales­ti­nienne. Si l’on y ajoute sa condam­na­tion de toutes les formes de violences poli­cières, comme celle qui a marqué la répres­sion du mouvement des gilets jaunes, Gisèle Halimi n’est pas exac­te­ment une féministe consen­suelle ». Réclamée dès 2020 par de nom­breuses figures fémi­nistes ou poli­tiques, la pan­théo­ni­sa­tion de Gisèle Halimi reste un point de discorde mémo­rielle entre le monde militant pro­gres­siste et le gouvernement.

    La pan­théo­ni­sa­tion, pomme de discorde entre les fémi­nistes et le président

    Dès août 2020, deux pétitions réclament la pan­théo­ni­sa­tion de l’avocate. Il faut attendre une infor­ma­tion exclusive de France Inter le 13 mai 2021 pour avoir un premier aperçu de la position d’Emmanuel Macron sur la question. La radio du service public annonce qu’il y a de fortes chances que le président refuse la pan­théo­ni­sa­tion de la figure féministe en raison de son enga­ge­ment en faveur de l’in­dé­pen­dance de l’Algérie au début de sa carrière d’avocate. Engagée contre la colo­ni­sa­tion, Gisèle Halimi a été l’avocate de militants du Front de Libération Nationale (FLN), parti indé­pen­dan­tiste ayant mené la lutte contre la France de 1954 à 1962. L’engagement féministe de l’avocate reste bien plus consen­suel aux yeux de l’opinion publique que cet engagement-​là : le FLN a commis des attentats sur le sol algérien et français pendant la Guerre d’Algérie. De nombreux civils ont été tués pendant le conflit dans des attentats ou massacres par le FLN.

    Après la fin de la guerre, en 1962, des massacres ont été commis par le nouveau pouvoir algérien contre les pieds-​noirs (Français d’as­cen­dance euro­péenne présents en Algérie) ou les harkis, ces soldats algériens qui ont combattu pour la France. Les harkis et leur des­cen­dance repré­sen­te­raient quelques centaines de milliers de personnes en France aujourd’­hui : en 2012, ils étaient au nombre de 500 000 environ. En 2012 encore, le nombre de Pieds-​noirs vivant en France était établi à plus de trois millions. Ce refus de s’ex­pri­mer offi­ciel­le­ment sur le sujet est émi­nem­ment politique : les des­cen­dants de harkis et des pieds-​noirs repré­sentent une partie impor­tante de la popu­la­tion et un électorat potentiel dont le soutien n’est pas négli­geable. La pan­théo­ni­sa­tion de Gisèle Halimi était recom­man­dée par l’his­to­rien Benjamin Stora, chargé par le gou­ver­ne­ment d’un rapport sur la mémoire de la colo­ni­sa­tion et de la guerre d’Algérie. La source de France Inter avait alors assuré que des asso­cia­tions de harkis et de pieds-​noirs « l’ont pris comme une insulte ». Au moment où la mémoire de la guerre d’Algérie reste encore très conflic­tuelle au sein de la société française, difficile de ne pas voir comment l’hommage à Gisèle Halimi en subit les consé­quences néfastes.

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