Les luttes du mois de mars s’intensifient. Les rassemblements contre la réforme des retraites sont rejoints par des cortèges féministes. À l’occasion de la Journée internationale des Droits des femmes – le 8 mars – plusieurs collectifs de nombreux manifestants se sont retrouvés devant l’Opéra de Lille, samedi 11 mars, pour défendre les droits des femmes, mais aussi protester contre la réforme des retraites qui leur est désavantageuse.
« So-so-solidarité, avec les femmes du monde entier », crient les cortèges de manifestants. Témoignages, lettres ouvertes, chants féministes animent le rassemblement qui a commencé à 14 heures devant l’Opéra de Lille. Plusieurs générations, qui brandissent des centaines de pancartes aux messages forts, écoutent solennellement les prises de paroles. « Le droit à l’IVG doit être inscrit dans la constitution » entend-on, ou « la réforme des retraites est une réforme misogyne qui condamne les femmes ». Cette dernière phrase résonne. Le 8 mars est un symbole puissant de lutte des classes. En effet, cette date fait référence au 8 mars 1917 où des ouvrières russes ont manifesté pour réclamer du pain et de meilleures conditions de travail. Les deux manifestations se sont d’ailleurs rejointes pour crier plus haut et plus fort.
Carrières hachées, retraites oubliées
Illana, militante dans le collectif Nous Toutes, arbore avec fierté sa pancarte. « Cette réforme est misogyne. Les femmes gagnent moins que les hommes et donc leurs cotisations et leurs retraites sont plus faibles. Sans parler des carrières hachées, les contrats précaires qui ont un terrible impact sur le montant des pensions de retraite. » En effet, selon l’Insee, en 2018, les femmes gagnent en moyenne 22 % de moins que les hommes et sont plus souvent contraintes de réduire ou d’arrêter de travailler après l’arrivée d’un enfant. Déjà aujourd’hui, 20 % des femmes choisissent de partir à la retraite à 67 ans, faute d’avoir pu cotiser suffisamment pour toucher une retraite à taux plein. La réforme des retraites met ainsi en lumière des inégalités salariales auxquelles font face les femmes. En plus d’emplois à temps partiel et moins bien payés que les hommes, les femmes sont principales actrices de l’économie souterraine et du travail domestique, un travail usant, qui n’est pas pris en compte dans le calcul de la retraite. En 2020, les femmes travaillaient 3 heures 36 gratuitement par jour (tâches ménagères et garde des enfants) contre 2 heures pour les hommes.
« Le droit à l’IVG doit être inscrit dans la constitution »
Autre revendication importante de ce 8 mars, l’inscription du droit à l’IVG dans la constitution. Bien que le projet de loi soit passé en première lecture à l’Assemblée nationale avec une modification dans le texte original, changeant « le droit à l’IVG » pour « la liberté des femmes d’avorter », les organisations féministes restent en colère. Cette « liberté des femmes à recourir à l’IVG » ne constitue donc pas un droit, mais un élément de la liberté des femmes. Dans le cortège lillois, des cintres pendaient à foison, et des pancartes « mon corps, mon choix » dansaient au-dessus des têtes.
La loi n’est pas encore passée, mais un petit plot twist a eu lieu en ce 8 mars. Alors qu’Emmanuel Macron rendait hommage à Gisèle Halimi, avocate défenseuse du droit à l’avortement, il a annoncé qu’il allait déposer un projet de loi constitutionnelle pour inscrire « la liberté des femmes à recourir à l’IVG » dans la constitution, modifiant le parcours du projet de loi en cours qui devait passer en deuxième lecture à l’Assemblée nationale. Un projet de loi constitutionnelle éviterait que le texte ne soit soumis à un référendum. Les associations féministes crient pourtant à « l’instrumentalisation politique » car si le quinquennat du président se voulait égalitaire, les inégalités perdurent entre les femmes et les hommes en France.