Derrière les belles performances se cachent souvent un travail de préparation important. Si l’aspect physique prend une place majeure, le mental est un élément à ne pas occulter. Une évidence pour Franck Blondeau, coach mental auprès des sportifs.
Professeur de sport la semaine, préparateur mental le reste du temps, Franck Blondeau a trouvé sa voie il y a onze ans. Depuis, il a su imposer, avec son travail, une méthode qui porte ses fruits.
L’accompagnement psychologique : une notion vitale pour certains sportifs
Dépressions, troubles mentaux ou légers coups de mou, les conséquences psychologiques peuvent gravement nuire aux performances d’un athlète, de tous les niveaux. Pour palier cela, certains sportifs ont décidé de ne pas faire face seul aux crises et ont fait appel à Franck Blondeau. Souvent éphémères, les échanges entre le coach mental et les sportifs peuvent être bénéfiques : « Ils peuvent s’autogérer et être autonome. Les sportifs que j’accompagne peuvent s’appuyer sur ce que je leur ai dit et le reproduire. Il n’y a pas de lien de dépendance » concède le coach.
« Je vois les sportifs comme des collaborateurs, pas comme des patients »
S’il a une méthode de travail précise, Franck Blondeau s’adapte en fonction des besoins du sportif. Il conçoit son travail comme une collaboration, « c’est un accompagnement. Il faut mettre des mots sur les maux ». Pour lui, pas question de se comparer à un psychologue, « chacun a son rôle à jouer ».
« Quand la tête va bien, le corps suit »
La synergie entre le physique et le mental semble primordiale pour obtenir de bons résultats. Si les deux aspects sont complémentaires, Franck Blondeau ne veut pas placer l’un au-dessus de l’autre. « Un sportif qui se sent bien physiquement va développer un aspect mental positif. À l’inverse les choses peuvent se compliquer si le mental est négligé ou mis au second plan » concède le coach.
Trois questions à Nouman Sibai, psychologue du sport
Quelles peuvent être les conséquences psychologiques d’une dépression ?
« Les dépressions peuvent générer un manque de motivation, s’accompagnant d’une fragilité émotionnelle et physique ainsi que d’un manque de confiance. Cela commence par une période de doute importante, suivi d’angoisses. L’estime de soi se fragilise et c’est le début d’une spirale négative dont il est difficile mais pas impossible de sortir. »
Le mental est-il plus important que le physique ?
« Si je devais définir un barème, je dirais que le mental compte pour 70 % et le phy- sique pour 30 %. Pour la simple et bonne raison que si dans sa tête on est bien, on va renforcer sa capacité d’amour vis-à-vis de soi-même. Si le mental empêche d’accepter le physique, on ne peut pas avancer. Le mental est indispensable pour permettre au corps d’aller au bout de lui-même. »
Quelle différence y a‑t-il entre un psychologue et un coach mental ?
« Un coach mental n’est pas un psycho- logue. Mais les deux peuvent contribuer au développement personnel. La psychologie intervient plus dans le domaine scientifique, c’est- à‑dire détecter et comprendre l’origine des problèmes. Un coach mental va davantage se focaliser sur l’accompagnement et les stratégies de développement personnel. »
« J’ai toujours préféré être bien dans ma tête et moins bien physiquement. »
En tant que joueur de football professionnel, Karim Azamoum a connu beaucoup de problèmes physiques durant sa carrière. Il a senti le besoin d’écouter son esprit, pour ne pas abandonner. Pour lui, la préparation mentale n’est pas un traitement mais une optimisation de la performance.
Joueur emblématique de l’ESTAC Troyes de 2013 à 2018, Karim Azamoum a toujours accordé beaucoup d’importance à son mental. Dans l’Aube, son club était en partenariat avec une coach cérébrale. Il a fini par s’attacher les services d’un coach personnel. Une collaboration qui a porté satisfaction selon le joueur.
« La notion du mental est vraiment très importante »
Pour Karim Azamoum, la préparation mentale n’est « pas un traitement mais une optimisation de la performance ». Pour le joueur, l’aspect psychologique permet d’être prêt à appréhender toutes éventualités, notamment les blessures, lui qui n’a pas été épargné par les problèmes physiques. En France, la fragilité émotionnelle des sportifs est taboue. En cause, une pression médiatique pesante et des supporters parfois oppressants. « Beaucoup se disent, je suis fort, je n’ai pas besoin d’aide, alors que si. C’est primordial pour être au top » prône le sportif. Admettre ses faiblesses est un premier élément clé pour générer une avancée émotionnelle.
Sortir de sa bulle et penser à autre chose que le foot
En construisant une famille, Karim Azamoum s’est créé un univers lui permettant de se détacher du sport. La lecture l’a aussi aidé à penser à autre chose : « C’est vraiment important de relâcher la pression et de sortir de sa bulle. C’est peut-être ce qu’il y a de plus compliqué dans notre domaine », confie le joueur, dont la carrière touche à sa fin.
« Voir quelqu’un, c’était admettre d’être faible pour moi »
Émile Legault a longtemps espéré percer dans le football, sa passion de toujours. Mais après plusieurs désillusions, le jeune joueur a décidé, à 21 ans, de raccrocher les crampons. La faute à une pression de plus en plus pesante.
Grand espoir du football canadien, Émile Legault a très vite mis un terme à sa carrière professionnelle pour se consacrer à ses études. Si le jeune footballeur a davantage voulu se focaliser sur ses cours, la charge mentale aussi eu raison de son arrêt prématuré. Une brève carrière, néanmoins utile : « Avec ce que j’ai vécu dans le foot, rien ne peut m’ébranler dans la vie maintenant ».
Le mode d’emploi pour gérer la pression, Émile ne l’a pas eu, et le regrette
Diminuer son anxiété ou augmenter sa confiance en soi, des astuces de coach qu’Emile Legault n’a jamais reçues. Des techniques et un accompagnement qui lui auraient permis d’améliorer ses performances pour perdurer dans le sport. « Je n’ai pas eu de mode d’emploi. On ne m’a pas appris à gérer la déception ou comment apprendre à perdre. »
« Je n’ai jamais pensé être triste. On m’a toujours rappelé d’être fort mentalement. »
Pour lui, consulter un spécialiste était : « s’avouer faible ». Une erreur selon Émile, qui s’en rend compte aujourd’hui. « J’étais jeune et je pensais que j’étais plus fort que tout » Depuis, le Canadien a repris goût au sport, dans un niveau inférieur. Un épanouissement loin de la pression médiatique et des supporters qui font de lui un homme enfin heureux.