Dans les prochaines semaines, TikTok mettra en place une mesure pour prévenir l’addiction des plus jeunes.
À 16 ans, Raphaël fait partie des milliards d’utilisateurs de l’application TikTok. Créé en 2016, le réseau social fait un carton par son principe : des vidéos courtes accompagnées de musiques. Raphaël peut les visionner pendant des heures, en scrollant, encore, et encore, et encore… « Je passe environ dix heures sur TikTok par jour » nous avoue-t-il avec un petit sourire contrit en regardant son téléphone. « Je ne m’attendais pas à ce que ce soit autant. » Il est bien au-dessus de la moyenne : les 4 – 18 ans passent en effet près de deux heures en moyenne par jour sur l’application. « Je me rends compte que ce n’est pas normal. Mais une fois qu’on est dessus, c’est impossible pour moi d’y échapper. »
Et c’est bien pour cet aspect addictif que TikTok est vivement critiqué. Pour se « rattraper », l’application a décidé de mettre en place une mesure pour tenter de protéger les mineurs. Après 60 minutes d’utilisation, ils recevront une alerte et devront obligatoirement rentrer un mot de passe s’ils souhaitent continuer à scroller. Raphaël prend la nouvelle sans inquiétude : « C’est assez simple de rentrer un mot de passe » ironise-t-il. « Et c’est encore plus simple de changer sa date de naissance sur l’appli ». Lorsque Raphaël créé son compte TikTok, il n’a que 11 ans. L’âge légal pour s’inscrire étant de 13 ans, il a tout simplement noté qu’il était né en 1993 : « Je n’ai pas eu à me justifier ».
Des parents inquiets
« On a vu qu’un changement de comportement s’opérait chez Raphaël il y a quelques années » avoue sa mère, Jeanne, au côté de son mari, Nicolas. « Il était plus renfermé, passait ses journées et soirées dans sa chambre sans sortir pour manger, ne nous parlait que très peu… » Jeanne et Nicolas décident de ne pas s’en inquiéter : c’est sûrement une crise d’adolescence. « Mais après on a remarqué qu’il ne se séparait vraiment plus de son téléphone. Il manquait des repas ou descendait en pleine nuit pour manger rapidement des gâteaux, ne sortait que pour aller en cours… » La faute à TikTok ? « Je pense que tous les réseaux sociaux et les téléphones en général ont leur responsabilité. »
Qu’en pense l’expert ?
Jean-Michel Delile est psychiatre et président de la Fédération Addiction. Selon lui, la mesure mise en place par TikTok peut s’avérer être « utile » : « Elle n’est pas venue spontanément, c’est le résultat d’une pression sociétale et politique. Néanmoins, c’est une bonne chose, d’autant plus que c’est ciblé sur les jeunes, c’est-à-dire le public le plus vulnérable face aux dérives addictives. On verra ce que ça donne, mais c’est sûr qu’il faudra aller plus loin ».
Mais pourquoi la pression est-elle sur TikTok et non pas sur un autre réseau social ? « Dans le domaine des drogues, plus un effet est intense et bref, plus ça accroche. C’est pourquoi sans doute TikTok occupe-t-il une place particulière. Son contenu étant stimulant et rapide, il est davantage addictif. » Il rappelle qu’un « travail sur le contenu doit être également fait, que ce soit sur TikTok ou ailleurs. Par exemple, des contenus sur l’apparence de soi, sur le physique, sont dangereux, parce que se comparer à d’autres peut entraîner une dépression ».
Info !
Si vous êtes sujets aux addictions, contactez le numéro vert du Fil Santé Jeunes au 0 800 235 236. Anonyme et gratuit, tous les jours, de 9h à 23h.