Santé Publique France a publié son dernier baromètre le 5 février dernier à l’occasion de la Journée nationale de prévention du suicide. L’organisme dresse un constat édifiant sur les idées suicidaires et les tentatives de suicide chez les 18 – 24 ans. La santé mentale des jeunes adultes se détériore grandement.
La tranche d’âge des 18 – 24 ans est la plus touchée par des idées suicidaires et des tentatives de suicide. L’étude réalisé par Santé Publique France comprend un échantillon d’environ 31 000 personnes âgées de 18 à 75 ans en France métropolitaine et dans les départements et régions d’outre-mer.
Dans l’introduction de son rapport, Santé Publique France explique : « L’objectif de ce travail est de présenter les résultats concernant la prévalence des pensées suicidaires et des tentatives de suicide en France en 2021, d’identifier les populations les plus concernées et d’observer les évolutions survenues depuis les années 2000 ». Santé Publique France observe une tendance de fond depuis dix ans avec une augmentation persistante des pensées suicidaires et des tentatives de suicide chez les 18 – 24 ans. Parmi le 18 – 75 ans, la prévalence des pensées suicidaires et des tentatives de suicide déclarées en 2021 était en légère baisse depuis 2014, tandis que celle des tentatives de suicide au cours de la vie s’était stabilisée.
7,2% de jeunes adultes ont pensé au suicide en 2021
L’étude indique que parmi les sondés de 18 à 75 ans, 4,2% ont pensé au suicide en 2021, dont 7,2% de jeunes adultes, âgés de 18 à 24 ans, contre 3,3% en 2014. Ainsi, les pensées suicidaires ont été multipliées par deux depuis 2014 chez les 18 – 24 ans. Le rapport révèle également que les femmes sont les plus représentées et concernées à hauteur de 4,8% contre 3,5% d’hommes. Concernant le nombre de tentatives de suicides déclarées au cours de la vie dans cette tranche d’âge, il a lui aussi quasiment doublé. En 2021, 9,2% des sondés avaient déjà tenté de mettre fin à leurs jours contre 6,1% en 2017. Au cours des douze derniers mois, ce chiffre a augmenté de plus de 60% passant de 0,7% en 2017 à 1,1% en 2021.
Les jeunes femmes sont particulièrement touchées. La prévalence des pensées suicidaires atteint 9,4 % des femmes de 18 – 24 ans, celle des tentatives de suicide au cours de la vie 12,8 %, et celle au cours de l’année 2 %. Santé Publique France rappelle que les résultats de cette étude « constituent un changement important puisqu’elles étaient inférieures ou comparables aux autres tranches d’âge de la population dans les baromètres santé qui ont précédé la pandémie de Covid-19 ». L’organisme de santé précise que les personnes en difficulté financière, celles en inactivité ou au chômage, celles vivant seules ou se déclarant en famille monoparentale sont davantage touchées par les idées et gestes suicidaires.
L’épidémie de Covid 19 responsable
Pour expliquer cette augmentation, l’étude souligne « l’impact important » de l’épidémie de Covid-19 et de ses différents confinements sur la santé mentale des plus jeunes. Une tendance largement retrouvée à l’échelle internationale. La Covid-19 est l’une des causes de cette dégradation de la santé mentale des jeunes selon l’agence de santé publique. Plusieurs facteurs viennent se rajouter à ça : les guerres, les difficultés économiques et les problèmes environnementaux.
L’étude met en relief une hausse de ces pensées suicidaires au regard des années précédentes : en 2017, toujours chez les 18 – 24 ans, 4,6% des sondés confiaient des idées suicidaires, quand en 2020 ils étaient 7,4%. Santé Publique France rappelle que l’âge médian de la dernière tentative de suicide est de 24 ans. Les adolescents, exclus de l’étude, seraient eux aussi particulièrement touchés.
La mise en œuvre d’une stratégie nationale
Face à ces chiffres élevés, le baromètre santé démontre de façon évidente la détérioration de la santé mentale des jeunes adultes. En parallèle de la mise en œuvre de la stratégie nationale de prévention du suicide et du renforcement des dispositifs de prise en charge, une meilleure compréhension des mécanismes qui affectent la santé mentale des plus jeunes depuis la pandémie de Covid-19 s’avère nécessaire pour Santé Publique France. « Il semble nécessaire de mieux comprendre les causes d’une telle évolution, afin de mieux cibler les facteurs de risque et de protection sur lesquels intervenir », ajoutent les auteurs du rapport. L’agence appelle à renforcer la prévention et à établir un meilleur accompagnement car parmi ceux qui sont passés à l’acte : « un peu plus de la moitié seulement disent avoir bénéficier d’un suivi après leur sortie de l’hôpital ». Cela permettrait notamment d’éviter les récidives.
Aujourd’hui, plusieurs dispositifs sont mis en place par l’Etat. Le 31 14 le numéro nationale d’écoute et de prévention du suicide disponible 24h/24 et 7j/7. Ainsi que le plan VigilanS déployé depuis septembre 2023 sur l’ensemble du territoire français. Il met en place un système de recontacte et d’alerte en organisant autour de la personne ayant fait une tentative de suicide un réseau de professionnels de santé qui assureront une veille et garderont le contact avec elle. D’autres actions sont présentes telles que les formations à la prévention du suicide ou au phénomène de contagion du suicide. Mi-janvier, le Sénat a voté à l’unanimité l’inscription de la santé mentale des jeunes comme grande cause nationale.