Il domine le ciel et est visible à un rayon de 45 kilomètres à la ronde. Inauguré en 1932, le beffroi de l’Hôtel de Ville de Lille est le plus haut beffroi civil d’Europe. Pour Contrepoint, nous nous sommes immiscés en son sein.
Vendredi après-midi, jour férié du fait de l’Armistice, les Lillois qui d’ordinaire sont au travail sortent pour renouer avec leur ville. Si certains ont décidé de flâner au centre-ville pour faire de bonnes affaires, d’autres se sont orientés vers les points culturels, notamment le beffroi de l’Hôtel de Ville.
Les beffrois du Nord : un véritable trésor régional
La région des Hauts-de-France abrite de nombreuses places iconiques et monuments historiques qui font son charme. Mais le beffroi occupe une place particulière, du fait de son histoire et de son importance dans l’imaginaire collectif des habitants.
Apparus au cours du Moyen âge, les beffrois étaient situés à proximité des clochers d’église et des donjons seigneuriaux. Ils étaient conçus dans le but de devenir des tours défensives, protégeant alors la cité.
Au XIVème siècle, le rôle des beffrois change, du fait de l’affirmation des rôles politiques des communes. Désormais, les beffrois servent à mettre en avant la puissance de ces dernières et de rythmer la vie des habitants.
Aujourd’hui, ces colosses ne disposent plus véritablement de fonction, si ce n’est des fonctions municipales et culturelles. Néanmoins, ils continuent de témoigner de la richesse du patrimoine flamand.
Un colosse soutenu par les pères fondateurs
Lorsque nous arrivons au pied du beffroi, un des piliers attire particulièrement notre attention. Deux figures sont sculptées sur ce dernier. En réalité, le beffroi de l’Hôtel de Ville rend hommage à Lydéric et Phinaert, dont l’histoire serait l’origine de la naissance de la ville que l’on surnomme « capitale des Flandres ».
Pour la petite histoire, en l’an 620, un prince bourguignon du nom de Salvaert se serait fait tuer par un seigneur local du nom de Phinaert. Le prince était accompagné de son épouse, Ermengaert, qui a réussi à s’enfuir. Ermengaert, qui était enceinte, aurait accouché d’un petit garçon, Lydéric. Quelques années plus tard, apprenant la vérité au sujet de son père, Lydéric serait partit à la rencontre du roi Dagobert, pour lui demander l’autorisation d’affronter Phinaert dans un duel judiciaire.
Le duel aurait eu lieu le 15 juin 640. Après s’être battu comme un lion, Lydéric aurai tué le seigneur Phinaert. Le roi Dagobert, pour féliciter le jeune homme d’avoir débarrassé le Nord d’un seigneur tyrannique, lui aurait confié les terres de ce dernier en récompense. C’est ainsi que Lille serait née.
L’accession au sommet du ciel : pour monter, on remonte le temps
Une fois rentrés au sein du beffroi, des escaliers se présentent devant nous. Ces derniers permettent l’accession au niveau supérieur du beffroi.
Une fois arrivés, un choix cornélien s’offre alors à nous. L’assistante d’accueil nous propose deux chemins pour accéder au sommet du titan en béton : soit nous empruntons l’ascenseur, soit nous prenons les escaliers. Un choix qui fait penser à un épisode mythologique, le choix d’Hercule. Le héros Grec devait choisir une voie et deux chemins s’offraient alors à lui, qui avaient pour noms Vice et Vertu.
Engagés dans les escaliers, nous découvrons au fur et à mesure les organes internes du beffroi. A chaque pallier, une information nous est donnée. On découvre alors que le beffroi de Lille a eu une grande importance dans le monde de l’audiovisuel et de la communication. Du fait de sa hauteur, le géant devient rapidement un émetteur de premier rang, se hissant alors au rang de quatrième dans le classement des émetteurs à l’échelle mondiale.
Le 25 avril 1950, Pierre-Henri Teitgen alors ministre de la Justice, inaugure la naissance de Télé-Lille, qui est la première émission et télévision régionale française. Elle prendra ses quartiers au sein du beffroi pendant 7 ans, avant de devenir France 3. Un an après, le beffroi permet la mise en place de la première liaison hertzienne entre Paris et Lille. La capitale de France et la capitale des Flandres sont alors reliées. C’est aussi ce colosse de béton qui permet la rediffusion du sacre de la reine d’Angleterre Élisabeth II, le 2 juin 1953. Il s’affirme donc comme véritable point stratégique de la télécommunication.
Pour son histoire, le beffroi de Lille est inscrit comme monument historique en 2002, puis sur la liste du patrimoine de mondial de l’Unesco, en 2005.
Lille : une ville, deux mondes
Après avoir montés les 415 marches qui composent le bâtiment, nous arrivons enfin au sommet du beffroi. Devant nous, derrière un grillage de sécurité se présente Lille. Sous un beau soleil d’automne, on constate que Lille est coupée en deux mondes bien distincts.
D’un côté, nous apercevons de nombreuses grues et infrastructures plus modernes. Celles-ci traduisent la modernisation constante de la capitale des Flandres.
De l’autre côté, nous observons le quartier historique de la ville du Nord. Nous pouvons apercevoir l’autre beffroi, situé sur la place de la bourse. Nous pouvons aussi apercevoir de nombreuses églises au loin, mais aussi des églises implantées dans la cité comme l’Église Saint-Maurice ou encore l’Église du Sacré-Cœur. Un point de vue incomparable qui permet donc à qui souhaite s’y rendre, de voir la ville phare des Hauts de France sous un autre angle.