La troisième édition du Festival de Cinéma Colombia Migrante, qui s’est tenue du 18 au 28 octobre aux quatre coins du monde, a fait escale ce week-end à Lille. À travers expositions, projections, tables rondes ou encore pièces de théâtre, les spectateurs se sont plongés au cœur des réalités colombiennes, où l’exil découle des bouleversements environnementaux.
Ce week-end, le cinéma L’Univers de Lille s’est transformé en un véritable carrefour culturel, où accents chantants se mêlaient aux odeurs gourmandes des empanadas et des arepas. Sur un buffet orné du drapeau colombien, les mets locaux invitaient à la découverte, tandis que les murs étaient décorés d’affiches colorées arborant le slogan « Migrer c’est résister. » Ce message résonnait avec force au cœur du festival, qui se tenait simultanément dans une quarantaine de villes à travers le monde, explorant le lien entre les migrations forcées et les crises environnementales.
Le grand écran comme terre d’accueil
Samedi après-midi, le court-métrage Flores del otro patio – Fleurs de l’autre jardin – de Jorge Cadena a électrisé la salle principale du cinéma par son audace et son intensité. Le film met en scène un collectif d’activistes queer du nord de la Colombie, qui déploie une esthétique excentrique pour dénoncer les ravages de l’exploitation de la plus grande mine de charbon du pays.
À la suite de cette œuvre percutante, le documentaire Territorio Pollui a offert une nouvelle perspective en explorant la relation complexe entre la communauté indigène Wayuu et l’eau. Sa réalisatrice, Carmela Daza, relate son propre voyage, lorsqu’elle découvre pour la première fois la péninsule de La Guajira, terre natale de son père. À travers les témoignages de leaders indigènes, elle expose les impacts dévastateurs de l’exploitation minière à ciel ouvert et met en lumière les stratégies de résilience développées par les femmes Wayuu face à la crise de l’eau, un enjeu crucial pour leur survie.
À l’issue de ces projections, la salle a accueilli Paula Martínez-Takegami, membre de l’association Citoyennetés pour la paix de Colombie. Elle a animé un moment privilégié visant à offrir aux spectateurs un espace de réflexion et de partage pour digérer les émotions suscitées par les récits poignants diffusés. Cette initiative a enrichi l’expérience collective du festival, soulignant le rôle du cinéma comme vecteur de sensibilisation et d’engagement social.
Des cris en croquis
Dans une salle adjacente, des dessins, photos et œuvres artisanales habillaient les murs blancs. Au centre, Ana Mejia-Eslava, l’une des artistes, expliquait le processus créatif derrière cette exposition. Elle a mis en lumière la lutte pacifiste de San José de Apartadó, une communauté du nord de la Colombie qui résiste depuis 27 ans face aux brutalités paramilitaires.
« C’est une communauté qui valorise la vie, la création et la joie, plutôt que de se laisser enfermer dans un discours de victimisation », expliquait Ana.
Comme bien d’autres communautés rurales en Colombie, San José de Apartadó subit la pression des groupes armés qui chassent les paysans de leurs terres. En mars dernier, deux membres de la communauté ont été assassinés, Nallely et Edinson, sans qu’aucune enquête n’ait été ouverte, a précisé Ana.
En offrant une tribune aux récits de résistance et de résilience, le festival de cinéma Colombia Migrante rappelle avec force que le septième art peut transcender le simple divertissement : il devient une véritable terre d’accueil pour les voix et les luttes invisibles. Les films du festival sont disponibles gratuitement sur son site web, n’hésitez pas à les visionner pour soutenir cette résistance tout en perfectionnant votre espagnol !