Depuis la mort d’un jeune homme en octobre dernier sur la place Vanhoenacker, le quartier Moulins de Lille est sous haute tension. Dans un contexte de violences et de tensions grandissantes, les riverains ont pris l’initiative d’envoyer une lettre collective à la mairie de Lille pour réclamer des mesures concrètes. Pour faire le point, nous avons rencontré Jean-Claude Menault, adjoint à la sécurité de la mairie.
Selon Jean-Claude Menault, la situation est alarmante : « Aujourd’hui, les consommateurs consomment sur place, devant les maisons et les garages, et ça crée des nuisances. » Le quartier subit un climat d’insécurité palpable, alimenté par la présence quotidienne de consommateurs et de dealers qui n’hésitent pas à occuper les parties communes des immeubles. Dans certaines rues, comme la rue Bergot, les habitants se sentent contraints de laisser leur porte ouverte sous la pression des dealers. L’adjoint à la sécurité souligne que cette situation alimente un véritable « sentiment de peur » parmi les riverains. « Ça devient invivable », confie une habitante de la rue Bergot. « Les consommateurs et les dealers sont là, à n’importe quelle heure, devant nos immeubles, dans les parties communes… On a peur de rentrer chez nous, peur pour nos enfants. » Les habitants de la rue, dénoncent un sentiment d’insécurité grandissant.
La vie quotidienne perturbée par les nuisances
L’affaire récente d’une femme agressée derrière la filature par un consommateur souligne encore plus la violence et l’agressivité de certains individus. « Les dealers tiennent la rue,» affirme Jean-Claude Menault, décrivant un contrôle territorial exercé par les trafiquants, qui met à mal le quotidien des résidents. Pour contrer ce phénomène, la mairie a intensifié ses efforts avec le Groupe local de traitement de la délinquance (GLTD) instauré en 2020 en coopération avec la Procureure de la République. Cette structure vise à judiciariser les questions de sécurité et à cibler directement les trafiquants pour les amener devant la justice. « On a repris la main sur la Filature, mais ils sont dans la rue maintenant,» concède l’adjoint à la sécurité, illustrant les limites de cette lutte constante. Face à la banalisation du trafic dans le quartier, la mairie a aussi installé des dispositifs de vidéoprotection, dont une caméra place Jacques Février, et prévoit d’en ajouter rue Bergot. « On a 160 caméras à Lille,» précise-t-il, bien que certaines caméras soient parfois déplacées ou désactivées par les délinquants eux-mêmes. L’adjoint insiste également sur le rôle central de la police nationale, qui intervient régulièrement dans le quartier. Pourtant, les commerçants ressentent toujours l’impact du trafic sur leurs activités. « Les clients consomment directement dans les rues, parfois même dans nos garages », raconte un commerçant de la rue de Douai, en montrant des traces au sol laissées par les consommateurs. « C’est pesant, certains sont agressifs. Les clients ne viennent plus en soirée. »
Une lutte partagée entre la mairie et la police
Jean-Claude Menault explique que « la stratégie se définit par les gens sur le terrain,» montrant le lien constant entre la mairie, la préfecture et la police. Mais il admet que « les leviers principaux, c’est la police et la justice, pas nous. » La mairie joue un rôle de « production de sécurité,» veillant à ce que les habitants puissent vivre en paix et agissant comme un relais de leurs préoccupations auprès des autorités. Outre les interventions répressives, la mairie travaille aussi en prévention, via la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA) et des projets comme « Limit’s » qui visent à dissuader les jeunes de se lancer dans le trafic de drogue.
Si la situation semble encore tendue, la mobilisation des riverains et les efforts conjoints des services publics montrent que la mairie n’abandonne pas la lutte pour la sécurité dans le quartier Moulins.