Le débat semble sans fin. Voilà 40 ans que la fin de vie est un sujet éthique, qui divise la classe politique. Remis sur le tapis ces dernières années, le projet de loi doit être examiné par l’Assemblée nationale. Cependant, François Bayrou a annoncé vouloir séparer fin de vie et développement des soins palliatifs.
Des années 1980 à 2016, le chemin du droit à mourir a été marqué par de nombreux épisodes historiques. C’est en 1978 que le texte sur le droit de vivre sa mort est débattu pour la première fois. Il anticipe, avec 27 ans d’avance, la loi Leonetti. Le texte abordait la question de l’acharnement thérapeutique à une époque où la médecine se développait drastiquement. Les débats n’iront pas plus loin, il faudra attendre 2005 pour qu’une loi soit votée.
Des lois qui ont marqué la médecine
Lutter contre cet acharnement thérapeutique, tel était le voeu de Jean Leonetti. Il relance le débat après l’émotion suscitée par la demande de mourir de Vincent Humbert, jeune homme devenu tétraplégique, aveugle et muet après un accident de la route. Dans son livre adressé à Jacques Chirac, il demande, de manière publique et officielle, qu’on l’aide à mourir. La fin d’un supplice qui lui sera refusé car la législation ne le permettait pas. La loi de 2005 est donc la première loi spécifique sur la fin de vie. Son objectif est de donner le choix au patient de refuser la poursuite des soins lorsqu’ils sont considérés comme inutiles, disproportionnés, ou sans effets. Dix ans plus tard, la loi Claeys-Leonetti va plus loin. Elle interdit toute « obstination déraisonnable » et autorise donc, sous conditions, le recours à la sédation profonde et continue, jusqu’au décès du patient. « Une loi mal connue », selon Stéphanie Villet, médecin en unité de soins palliatifs. « On peut, avec la loi actuelle, endormir le patient pour le soulager. Le problème est que les gens ont peur de mal mourir ».
Vers une loi sur une aide active à mourir
Inscrire la fin de vie dans la législation était une promesse de campagne d’Emmanuel Macron. Il s’agirait, dans les faits, de délivrer à un patient qui en fait la demande, une substance létale. Celui-ci pourrait se l’administrer lui-même (suicide assisté) ou, dans un autre cas, pourrait demander à un médecin, un infirmer ou un proche volontaire, de lui administrer (euthanasie). Un geste lourd, non sans conséquences pour la personne qui administre le produit, c’est pourquoi le patient devra être considéré comme capable et éclairé. L’aide médicale à mourir exclut donc les personnes atteintes de maladies mentales. De même, les médecins devront s’assurer que le pronostic vital est engagé à court ou moyen terme : de quelques heures à quelques mois maximum.
Une classe politique divisée
L’Assemblée nationale ayant été dissoute en juin 2024, les débats ont été reportés à ce début d’année 2025. François Bayrou a annoncé vouloir séparer ce projet de lois en deux volets. Il souhaite aborder le sujet de l’aide médicale à mourir et celui des soins palliatifs séparément. « Tout le monde est d’accord pour une loi sur les soins palliatifs » explique Stéphanie Villet. « Aujourd’hui, la problématique est qu’on n’a pas assez de moyens financiers et humains pour que les soins palliatifs soient accessibles à tous en France ». Vingt-et-un départements ne comptent pas d’unité de soins palliatifs de nos jours, une véritable inégalité dans l’accès aux soins. Un problème de fond, selon les soignants pour qui une loi sur le développement des soins palliatifs est nécessaire. Pour les défenseurs d’une loi englobant la fin de vie et les soins palliatifs, notamment l’Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité, cette décision « ressemble à une manoeuvre dilatoire ». Deux cent députés de la gauche et du camp présidentiel ont envoyé un courrier au premier ministre. Ils craignent que cette loi sur la fin de vie ne soit finalement pas votée seule. Pour eux, dissocier les deux serait une erreur car « l’aide médicalisée active à mourir est une forme ultime de soin palliatif ». À l’instar de nos voisins européens ils demandent à ce que ces soins coexistent.