En quelques années, la fast fashion a bouleversé le paysage de la mode d’occasion. Des sacs entiers de vêtements Shein ou H&M arrivent chaque semaine dans les dépôts associatifs. Les friperies tentent tant bien que mal de préserver leur identité.
Longtemps considérées comme des lieux alternatifs et durables, les friperies représentaient une manière responsable de consommer la mode. On y redonnait vie à des vêtements de qualité, tout en limitant le gaspillage textile. Mais depuis quelques années, l’arrivée massive de la fast fashion en France, incarnée par des marques comme Shein, H&M ou encore Bershka, bouleverse cet équilibre. La fast fashion produit des quantités colossales de vêtements à bas prix. Les consommateurs achètent davantage, mais portent leurs vêtements de moins en moins longtemps et s’en débarrassent rapidement. Ce textile de mauvaise qualité, provenant en grande majorité de Chine, finit souvent dans les dons aux associations ou chez des grossistes spécialisés.
Les friperies associatives, premières victimes
Chez Henry, friperie de l’association Croix-Rouge française portant le nom du fondateur, offre une large gamme de vêtements de seconde main aux Lillois. Tous les fonds sont reversés à la Croix-Rouge, c’est pourquoi tout le personnel est bénévole. La boutique fonctionne sur le principe du don. Les modes de consommation textile des français ont un impact direct sur les articles présents dans les rayons. Nawel, bénévole, s’exclame devant l’augmentation de la fast fashion : « Les quantités deviennent énormes ! On reçoit beaucoup plus, ces derniers temps, de vêtements Shein. On trie énormément parce qu’on ne veut pas de produits médiocres ». L’association souhaite rester accessible dans son essence, tout en préservant la qualité textile : « Quand on voit l’étiquette Shein, on le donne directement à un relais. On le voit aussi par la composition du vêtement. Et si il n’y a aucune indication, on le remarque tout de suite à la matière et à la qualité ».

Les friperies indépendantes, le dernier rempart
Emma, la cogérante de Frip’Up, met en avant sa passion pour la mode. Elle sélectionne soigneusement les vêtements et choisit toutes les pièces qu’elle proposera en boutique. Cependant, elle achète certains pantalons en gros et reçoit parfois des articles provenant de la fast fashion. Emma relativise face à l’afflux de la fast fashion : « Quand on en reçoit dans les lots, on les vend quand même, mais uniquement du Zara ou du H&M, pas de Shein. On reste sur de la qualité », explique-t-elle avant d’ajouter : « On peut changer les mentalités sur les friperies en modernisant les articles. Une personne vient pour un Zara et repart en ayant découvert le vrai vintage. » Et si nous comparons les friperies, il faut aussi comparer la clientèle. Emma pense qu’il doit y avoir une pédagogie apportée aux clients : « On doit guider les personnes dans l’univers de la seconde main. La bataille n’est pas la même avec les gens qui ne connaissent pas le principe des friperies ».