Construit sous Louis XIV, le Fort Vauban à Ambleteuse a traversé l’histoire. Il porte les stigmates des périodes militaires successives (Vauban, Napoléon, la seconde guerre mondiale). Un scan en 3d du monument historique va permettre de comprendre son histoire archéologique afin de mieux le préserver.
La semaine dernière, trois étudiants en archéologie de l’université Paris Panthéon Sorbonne ont ausculté les entrailles du fort Vauban à Ambleteuse, non à la loupe et au pinceau comme leurs lointains prédécesseurs, mais avec un scanner numérique. Un étudiant doctorant, Thibaut Menuge, originaire de Douai, aidé par deux étudiants en master, Marie Rouppert et Louis Cordonnier, ont ainsi dressé une maquette virtuelle du fort Vauban qui sera très utile par la suite.
Ces travaux entrent dans le cadre d’une thèse sur l’application du « Heritage building information modelling » qui consiste à créer une maquette informatique d’un bâtiment en reprenant ses spécificités techniques et archéologiques ainsi que les données d’études sanitaires de l’architecte.
On peut, grâce à cette technique, effectuer des visites virtuelles du bâtiment à une époque donnée en retirant par exemple les ajouts de la Seconde guerre mondiale
« On peut, grâce à cette technique, effectuer des visites virtuelles du bâtiment à une époque donnée en retirant par exemple les ajouts de la Seconde guerre mondiale » explique ainsi Thibaut Menuge. La particularité du fort d’Ambleteuse est en effet d’avoir traversé l’histoire en subissant des modifications majeures.
Thibaut Menuge et Louis Cordonnier ont relevé l’état de la maçonnerie du fort, pierre par pierre !
Le fort dressé par Vauban entre 1682 et 1690 a ainsi été agrandi sous Napoléon qui a rajouté un mur extérieur, une écurie, un corps de garde. Puis la tour d’artillerie a été modifiée par les soldats allemands qui ont coulé du béton à l’intérieur de la salle capitulaire mais aussi érigé deux blockhaus sur les terrasses extérieures, côté mer. On peut ainsi mesurer l’impact des constructions en béton du XXè siècle sur un monument en briques du XVIIè. Des dommages parfois conséquents, comme ces infiltrations d’eau récurrentes à travers la chaux de la salle capitulaire qui provoquaient la formation de stalactites et de stalagmites. Jusque’à ce qu’on découvre que le blockhaus de 1942 du deuxième étage était la cause de ces infiltrations.
Deux techniques bien précises
Pour mener à bien leurs travaux, les étudiants ont utilisé deux techniques bien précises. La lasergrammétrie, qui consiste à scanner le monument en un nuage de points pour pouvoir ensuite dresser une maquette numérique. Puis la photogrammétrie qui permet de comprendre l’évolution au fil du temps en relevant, pierre par pierre, l’état du monument.
Cette mission d’une semaine avait aussi pour objectif de faire un chantier école pour des étudiants dont la spécialité est de travailler l’archéologie des bâtiments historiques. Pas moins de 800 photos ont ainsi été prises afin d’avoir un relevé de la maçonnerie, mais aussi 60 Go de données informatiques dans la zone des écuries et des latrines du monument.
Une banque de données
« C’est une précieuse banque de données pour nous » a déclaré Jean-Yves Méreau, président des Amis du fort d’Ambleteuse, qui s’est félicité de cette coopération entre l’université de Paris, la DRAC et son association qui est propriétaire du bâtiment. Grâce à ces travaux, on pourra cerner les priorités avant les futurs chantiers. Car il ne faut pas rêver : pour maintenir à flot ce fort militaire en mer du XVIIè et le préserver des outrages du temps, il faut en permanence se pencher à son chevet.