Depuis plusieurs jours, les rues de Lille ont vu apparaître de nouvelles plaques non-officielles portant les noms de figures féminines ayant marqué l’histoire. Cette action symbolique, orchestrée par le collectif féministe Place Égale, vise à dénoncer la sous-représentation des femmes dans l’espace public.
Dans la nuit du 7 au 8 mars, veille de la Journée internationale des droits des femmes, 70 membres du collectif Place Égale ont investi les rues de Lille. Leur mission ? Coller de petites affiches blanches sous les plaques de rue existantes, rebaptisant ainsi 344 rues avec des noms de femmes emblématiques telles que Betty Davis, Agatha Christie, Sigrid Undset ou encore Martine Aubry. L’objectif est clair : rendre hommage aux femmes qui ont marqué l’histoire mais qui restent largement absentes des noms de rues. « Elles ont eu de grandes carrières ou ont marqué l’histoire, mais elles sont moins mises en valeur », souligne Maëlig, l’initiatrice du projet.
Un déséquilibre flagrant dans l’espace public
L’idée de cette action est née en janvier dans l’esprit de Maëlig, jeune étudiante lilloise, après la lecture de plusieurs articles dénonçant l’inégalité dans la nomination des rues. Et pour cause : à Lille, seules 4,3% des rues portent le nom d’une femme, contre 53,6% dédiées à des figures masculines. Pour autant, le collectif n’a pas cherché à effacer les personnalités historiques masculines. Maëlig explique : « Nous avons délibérément placé nos collages sous les plaques existantes pour ne pas masquer les noms d’origine. L’objectif n’est pas de remplacer les hommes, mais de mettre les deux sexes sur un pied d’égalité. » Cela se reflète également sur la page Instagram du collectif, qui partage des explications sur les hommes et les femmes ayant inspiré les changements de noms des rues. « Nous avons étudié les métiers des hommes, pourquoi ils étaient célèbres et pourquoi leurs noms étaient attribués aux rues. Ensuite, nous avons recherché une femme ayant occupé un poste similaire. C’est pourquoi nous avons renommé la rue Pierre Mauroy en l’honneur de Martine Aubry, qui a été maire et ministre, tout comme lui. » Toutefois, elle souligne que certains noms pourraient être remplacés sans grand débat : « Des propriétaires terriens qui ont simplement donné leur nom à une rue parce qu’ils en possédaient la parcelle pourraient être remplacés par des femmes ayant réellement marqué l’histoire. »
Des collages éphémères mais un message durable
Bien que ces plaques en papier soient destinées à disparaître avec le temps et les intempéries, le collectif ne compte pas en rester là. « Sur nos réseaux sociaux, on nous a fait remarquer qu’avec la fusion de Lille, Lambersart et Hellemmes, de nombreuses rues ont des noms similaires, ce qui peut poser problème. Nous aimerions suggérer à la municipalité de renommer ces rues en double en y attribuant des noms de femmes », explique Maëlig. Le collectif a déjà réfléchi à des figures féminines emblématiques de la région, comme Jeanne de Flandres. Ils invitent les habitants à découvrir ces figures en se promenant dans les rues et en s’informant sur leur héritage, une manière d’inscrire ces noms dans la mémoire collective, même sans modification officielle des plaques. Par ce geste fort, Place Égale espère susciter une réflexion plus large sur la place des femmes dans l’espace public et encourager d’autres villes à suivre cet exemple.