Une exposition remet à l’honneur les femmes-artistes au palais des Beaux Arts de Lille. Son nom ? « Où sont les femmes ». Depuis le 20 octobre jusqu’au 11 mars, celle-ci a pour objectif de mieux faire connaître les 80 artistes présentes dans les collections lilloises.
Pour le musée, tout part d’un constat simple : où sont donc passées les femmes ? Elles sont sur les cimaises du bâtiment, représentées sur les diverses œuvres d’art, mais elles ne sont pas de l’autre côté de l’œuvre. En effet sur les 60 000 artefacts que compte le musée, seuls 135 ont été produits par des femmes et peu ont été exposées auparavant. Alors pourquoi ce manque d’exposition ? Ce désaveu post-mortem ? Ce manque d’œuvre ?
Le projet
Les œuvres étaient toutes présentes au sein de la collection du palais. Le travail collectif des équipes a permis la sélection des œuvres parmi les milliers que stocke le musée. Le critère de choix était simple et original, le genre de l’artiste. C’est ainsi que se côtoient au sein de ces mêmes espaces, des œuvres d’une grande hétérogénéité. Le style, la technique, l’époque et la célébrité des artistes, tout se voit mélanger. On pourra retrouver aussi bien l’artiste du 21e siècle Carole Fékété et son nuancier de couleur qu’Adèle Romany, portraitiste du 18e siècle, bien d’autres sont présentes et notamment de nombreuses artistes nordistes et locales. Qu’elle est, était oublié, peu connue ou reconnue, toute sont mises en avant et présentées sur un pied d’égalité.
Une exposition scindée en trois
Les productions artistiques sont réparties dans 3 sections, chacune est censée représenter un temps lors de la création de celles-ci et les méthodes d’invisibilisation ou d’exclusion de la gente féminine lors de cette étape.
La première partie est centrée sur le moment qui précède la création, la formation des artistes. On y voit exposer des femmes qui ont dû se faire la main seule ou par des sentiers hors des enseignements officiels à une époque où l’une des voies d’apprentissage était de grandes écoles très peu ouvertes aux femmes. Dans cette allée, on peut voir celles qui ont développé ou sont passées par des enseignements créés pour les femmes comme la Lilloise Marguerite Dubuisson qui permettra l’ouverture des beaux-arts aux femmes. On aperçoit aussi celles qui ont dû se former dans le cercle familial et par conséquent du s’extraire de l’ombre que leur faisait leur entourage masculin, telle que Jacqueline Comerre-Paton qui avec sa peinture nommé « Jeune Hollandaise » est devenue le visage de l’exposition.
Au détour d’un couloir, on arrive dans la seconde section, c’est le moment pendant la création qui est observé. On y apprend comment la hiérarchisation des thèmes permet de reléguer au second plan les sujets essentiellement traités par les femmes ou qu’on leur a attribué sur la base de critères comme la différence de sensibilité. On y observe donc surtout des natures mortes qui sont l’exemple significatif du thème qu’on a déclaré être moins honorables. On peut ici observer en autre le réalisme dont font preuve Louise-Marie-Antoinette De Hem ou encore Elisabetta Marchionni lorsqu’elle représente ces sompositions inertes.
Enfin, c’est l’étape de la diffusion de l’œuvre qui est traitée dans la dernière section. L’importance du réseau est ici parfaitement montrée. Les femmes qui ont vu leurs œuvres nous parvenir sans voir leurs nom oubliés par le temps avaient accès à ces réseaux. Ayant plus de difficulté a rentrer dans ceux-ci et devant parfois utiliser des stratagèmes comme l’emprunt de noms masculins, on comprend mieux pourquoi les femmes se voient si peu exposées.
L’exposition se veut dans toutes les sections instructives et met vraiment les autrices en avant. Chaque œuvre est affublée d’un descriptif qui ne la décrit pas elle, mais l’artiste qui l’a conçu. On y apprend sa vie, ses influences, ses techniques, sa reconnaissance de son vivant et les raisons de son oubli ou au contraire de sa popularité.
Ce n’est jamais vraiment terminé…
En effet, l’exposition ne se cantonne pas à ces quelques pièces. Les salles permanentes du musée voient certaines de leurs créations accolées de pastilles, celle-ci sont du même violet que celui qui accompagne les pièces temporaires. Elles servent à montrer les femmes cette fois-ci représentées par les hommes. On aperçoit alors tous les archétypes stéréotypé accompagné d’explications allant de Vénus dénudée à la sage mère de famille, toutes les visions féminines fantasmées sont analysées. Cette chasse aux symboles violacés viendra alors compléter les connaissances que l’on aura tirées de l’exposition.