Si la pratique religieuse recule en France (50,2% se disaient sans religion en 2008 selon une enquête Arvale contre 58% en 2018), la pratique des santons de Provence perdure dans les foyers des français. Retour sur ces « petits saints » (sautoun en provençale) qui ne cessent d’émerveiller petits et grands. Une tradition pluricentenaire et bien ancrée !
La légende veut que ce soit en effet Saint François d’Assise, le fondateur des franciscains qui, en 1223, décide de représenter la crèche. A cette époque hautement religieuse, les statues sont limitées en nombre : Marie, Joseph, l’enfant Jésus, l’âne et le bœuf. Le but est d’abord de représenter la scène de la nativité. Autre bémol de taille : les figurines de l’époque sont faites en plâtre ou en cire et ne durent pas très longtemps.
Les vents de la Contre-Réforme
Au XVIIème siècle, en réponse au Protestantisme qui prend de l’ampleur pour dénoncer les abus de l’Église catholique, l’Église organise une Contre-Réforme afin de récupérer l’unité religieuse perdue. C’est dans ce contexte que les carmélites sont chargées de développer le culte de la sainte enfance de Jésus. Commence alors la fabrication de petites figurines d’églises. L’ordre du Carmel étant nombreux dans le sud-est de la France, il n’est guère étonnant de constater la naissance, quelque temps plus tard, des santons de Provence. Côté matériaux, les figurines évoluent peu à peu. Elles sont fabriquées en bois, en papier-mâché ou en verre, pour des notables qui apprécient de prier en comité réduit.
Du symbole de la résistance à celui de l’unité
Pendant la révolution française, qui se veut rationnelle et tournée vers la liberté de conscience, l’égalité sociale entre les Hommes et la fraternité entre les peuples, le culte catholique est interdit. Les santons deviennent donc un moyen réfractaire d’affirmer sa foi d’autant plus simple que ces figurines, par leurs petites tailles, sont très faciles à dissimuler. A la sortie de la révolution française, Napoléon signe en 1801 un Concordat permettant le retour des cultes. C’est dans cet intervalle que Jean Louis Lagnel innove en inventant des santons faits d’argiles. En utilisant des moules de plâtre, il produit des statuettes de ses voisins vêtus dans la mode de l’époque et représentant différents métiers. Par sa méthode de fabrication à faible coût, il a rendu à bas-prix les santons accessibles à tous. Cela conduit à la naissance de la foire aux santons en 1803 à Marseille, où petits et grands se rassemblent.
Les ajouts de la mère des santons
C’est néanmoins Thérèse Sicard, née Thérèse Neveu, qui, vers la fin du XIXème siècle, va apporter des modifications aux santons qui feront leur succès d’aujourd’hui. En effet, « la dame du Clastre » en référence à son atelier de la tour du Clastre fait cuire les santons en argile, ce qui les rend plus faciles à transporter. Elle décide également de leur faire porter des tenues traditionnelles déjà considérées comme désuètes à son époque. C’est à ce moment-là que le santon devient une ode au passé féérique et pastorale sous lequel se rassemble la famille autour de valeurs communes. Très vite, en plus des villageois traditionnels apparaissent des personnages historiques et politiques dans les crèches variant selon les époques. L’après seconde guerre mondiale voit aussi l’apparition de santons habillés et articulés, car les santons sont le témoignage vivant du croisement entre modernité et tradition, afin de raconter des scènes laissées à l’interprétation du lecteur.