Il ne s’est écoulé qu’un mois depuis l’investiture de Donald Trump en tant que président des États-Unis, et pourtant, plusieurs décrets ont déjà été signés par ce dernier, portant atteinte aux droits des personnes transgenres. Des mesures qui suscitent de vives réactions à travers le pays. Place au bilan.
Tout au long de sa campagne, Donald Trump avait annoncé qu’il était nécessaire de remodeler l’identité américaine au nom d’une guerre culturelle contre « le wokisme ». Il avait assuré qu’il « mettrait fin, dès le premier jour et d’un simple trait de plume, au délire transgenre ». Il n’a pas fallu attendre longtemps pour que cette promesse faite à ses partisans soit tenue. Le jour même de son investiture, le 20 janvier dernier, le président des États-Unis a signé une série de décrets, dont certains concernent directement les droits des transgenres.
Les Etats-Unis ne reconnaissent que le genre masculin et féminin
Ce jour-là, Donald Trump a déclaré que les Etats-Unis ne reconnaîtront plus que « deux sexes, masculin et féminin », les deux sexes biologiques définis à la naissance. Il nie ainsi l’existence administrative des personnes transgenres. Ce décret a entraîné la suppression immédiate des mentions des pronoms dans les signatures de mail au sein des agences fédérales et ministérielles et la disparition des pages d’informations consacrées aux personnes LGBT sur les sites gouvernementaux. Cette décision supprime également tous les programmes, contrats ou subventions qui prônent ou inculquent « l’idéologie du genre ». Pourtant, aux Etats-Unis, selon le William Institute de l’université de Californie, environ 1,6 millions d’américains soit 0,6% de la population du pays, dont 300 000 âgés de 13 à 17 ans, s’identifient comme transgenre. Par ailleurs, cela ne signifie pas qu’elles ont toutes entamé des thérapies de transition. Ce décret limite par la même occasion la possibilité pour les personnes transgenres de faire des demandes pour modifier leur sexe sur les papiers d’identité. La seule condition pour pouvoir le faire est de fournir une preuve d’une transition médicale complète. Cette non-reconnaissance inquiète les personnes concernées et leur entourage. En effet, selon une étude du William Institute, 81 % des adultes et/ou non binaires vivant aux Etats-Unis ont déjà envisagé de s’ôter la vie, dont 42% qui ont déjà essayé et 56% ont commis des actes d’automutilation au cours de leur vie.
Les transgenres ne pourront plus s’engager dans l’armée américaine
Introduite par Donald Trump lors de son premier mandat puis retirée par Joe Biden, l’interdiction pour les personnes transgenres de s’engager dans les rangs de l’armée est de nouveau d’actualité. Mais cette décision est plus ferme. La couverture médicale liée à la transition dans le cadre des assurances militaires est également interdite. « Pour nous assurer que nous disposons de la force combattante la plus létale du monde, nous allons débarrasser notre armée de l’idéologie transgenre », explique Donald Trump. Le décret prévoit que « l’adoption d’une identité de genre incompatible avec le sexe d’un individu contredit l’engagement d’un soldat envers un mode de vie honorable, véridique et discipliné, même dans la vie personnelle ». Pourtant dans l’armée américaine, ce sont près de 15 000 personnes qui sont concernées par ce décret, parmi les 2 millions de soldats. « Ces mesures suivent le modèle cruel de Trump, déplore Karla Gonzales, directrice de la division Genre d’Amnesty International. Dans ses attaques contre les personnes trans, que ce soit dans le cadre du service militaire ou en tentant de redéfinir le sexe et le genre pour tenter d’effacer les personnes trans, l’administration Trump a fait de la haine et de la discrimination son programme ». L’ONG Human Rights Watch souligne quant à elle la violation des droits fondamentaux des personnes transgenres à ne pas subir de discrimination en vertu du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Même si cette décision a fait l’objet de contestation, la Cour Suprême étant en majorité conservatrice, a décidé de rejeter les recours pour annuler cette mesure.
Les aides des soins de santé pour les mineurs transgenres sont désormais interdits
Donald Trump annule le règlement de l’ère Obama qui interdisait la discrimination fondée sur l’identité de genre dans les soins de santé. Ainsi, les prestataires de l’aide médicale pourront refuser d’effectuer des services liés à la transition de genre, invoquant la liberté religieuse et de conscience des soignants. « À travers le pays, les professionnels de santé mutilent et stérilisent un nombre grandissant d’enfants influençables, explique Donald Trump. Cette tendance dangereuse sera une tache sur notre histoire et elle doit prendre fin. » Les aides publiques pour les traitements de transition de genre des mineurs, chimiques comme chirurgicaux, sont désormais arrêtées depuis le 28 janvier. Ainsi, plusieurs établissements de santé dans la plupart des Etats ont décidé de suivre cette directive sous peine de voir leur financement fédéral suspendu. Pourtant, l’arrêt des médicaments pris par ces adolescents, qui sont des bloqueurs de puberté, peut avoir de graves conséquences sur leur santé physique et mentale. Ces deux décrets font réagir. Ils sont plusieurs associations à avoir saisi la justice pour l’annulation de ces deux décrets. Alex Sheldon, directeur exécutif de GLMA (Gay and Lesbian Medical Association) rappelle que les processus médicaux pour les prises en charges des mineurs sont précis et délicats. De son côté, Human Rights Campaign rappelle que, « en empêchant les médecins de fournir ces soins ou en menaçant de retirer des enfants à leurs parents qui les soutiennent dans leur transition, ces projets de loi empêchent les jeunes transgenres, non binaires et d’autres genres d’accéder à des soins de santé médicalement nécessaires et sûrs, soutenus par des décennies de recherche et soutenus par toutes les grandes associations médicales représentant plus de 1,3 millions de médecins américains ». 26 Etats ont adopté des lois pour restreindre ou interdire les soins de réaffirmation de genre pour les mineures. Dans des États progressistes, comme la Californie ou New-York, la protection des droits des transgenres en particulier sur la santé a été renforcée.
Les femmes transgenres incarcérées dans des prisons pour hommes
La non-reconnaissance des personnes transgenres a entraîné le transfert de plusieurs détenues transgenres dans des prisons pour hommes. Elles sont plusieurs femmes à avoir saisi la justice. Le 4 février, le transfert de trois détenues a été bloqué par un juge fédéral, notant que les plaignantes avaient « directement démontré qu’un préjudice irréparable s’en suivrait si leur demande était rejetée ». Selon une étude californienne de 2021, 69% des femmes transgenres incarcérées dans des prisons masculines ont été forcée à accomplir des actes sexuels et 58,5% ont été violemment agressées sexuellement.
Les transgenres sont exclues des compétitions sportives
Le décret appelé « Keeping Men out of Women’s sport » (« gardons les hommes en dehors du sport féminin ») abroge celui de Joe Biden qui avait établi des protections pour l’administration des droits des étudiants LGBT+. Ainsi, les femmes transgenres ont pour interdiction de participer dans leur catégorie. « Avec ce décret, la guerre contre le sport féminin est terminée, explique Donald Trump. À partir de maintenant, les sports féminins seront réservés aux femmes ». Les écoles qui feraient la promotion de « l’idéologie de genre » pourraient perdre leurs subventions fédérales. « Notre communauté est terrorisée, confie Sasha Buchert, membre de l’association Lambda Legal. Ces décrets honteux cherchent à discriminer les personnes transgenres dans tous les domaines possibles. Si Trump en fait sa priorité numéro un, c’est parce qu’il veut détourner l’attention du public des questions comme l’inflation, les tueries dans les écoles ou le coût élevé des assurances santé pour lesquelles il n’a pas de réponse. »
Quid aux JO de Los Angeles ?
La question des JO 2028 à Los Angeles reste tout de même en suspens. « À Los Angeles, en 2028, mon administration ne restera pas les bras croisés à regarder des hommes battre des athlètes féminines, a‑t-il déclaré. Mon gouvernement va refuser toutes les demandes de visa faites par des hommes qui tentent d’entrer frauduleusement aux Etats-Unis tout en s’identifiant comme des athlètes féminines”. Le CIO a quant à lui déclaré que l’instance, « continuera à expliquer et discuter des divers sujets avec les autorités compétentes, en collaboration avec les fédérations internationales qui s’occupent de fixer les règles d’éligibilité ».
Les droits des personnes transgenres n’ont jamais été autant remis en question qu’à l’heure actuelle. À l’instar de la fille transgenre d’Elon Musk, de plus en plus de personnes envisagent de quitter le pays des libertés. Dans les mois à venir, il est probable que le milliardaire républicain instaure des mesures encore plus strictes et fermes.