Depuis plusieurs mois, les buralistes belges vivent un bouleversement. Dans le cadre des politiques de santé publique européenne, la vente de tabac est désormais strictement encadrée : les paquets doivent être dissimulés au regard des clients, les publicités sont interdites, et même les accessoires liés au tabac (papiers, tubes, cigarettes électroniques…) doivent être rangés à l’abri du regard.
« Ils ont dit que tout ce qui est en rapport avec le tabac devait être caché », explique Abdallah Hassan, patron de Tabac Magic XL à Mouscron. Derrière cette mesure, l’objectif du gouvernement est clair : rendre la cigarette moins visible, donc moins désirable, notamment auprès des jeunes.
A terme, certains évoquent même la perspective d’une Belgique sans tabac « C’est possible que ça s’arrête un jour, ça dépend du ministre de la Santé », confie le vendeur. Ces nouvelles règles ne sont pas sans conséquence pour les buralistes. En effet, la dissimulation est obligatoire pour tous les produits ayant un lien avec le tabac. Si un vendeur est contrôlé et qu’il ne respecte pas ces règles, il se verra infliger une amende pouvant atteindre les 30 000 euros.
Un prix du tabac devenu équivalent à celui de la France.
L’autre coup dur est venu des hausses successives de prix. « C’est la dernière augmentation qui a tout fait dérailler », confie Loïc Becca de King Tabac à Mouscron. La Belgique, autrefois refuge des fumeurs français en quête du prix le plus bas, n’attire plus autant. « Avant, ils venaient de France, maintenant ils vont au Luxembourg », constate-t-il.
La cartouche de Marlboro coûte environ 120 euros en Belgique, contre 130 euros en France… mais seulement 75 euros au Luxembourg. Ces commerçants voient leurs ventes chuter. « Avant, on commandait deux fois par semaine, maintenant une seule », déplore Loïc qui estime avoir perdu près de 40% de son chiffre d’affaires. Les clients français reconnaissent eux-mêmes que la différence n’est plus aussi avantageuse qu’avant.

Malgré cela, certains continuent de franchir la frontière pour acheter du tabac. « Il y a encore un ou deux euros d’écart, mais je continue de venir en Belgique », raconte Marine, une fumeuse interrogée. Mais celle-ci explique ne pas être inquiète d’une éventuelle future interdiction : « S’il le faut, j’ai des amis au Luxembourg, je passerai commande.»
Avec les mesures sanitaires et les enjeux économiques, la Belgique marche sur un fil. Les autorités espèrent réduire la consommation de tabac, tandis que les commerçants voient leur activité s’éteindre lentement. Une transition vers un pays « sans tabac » qui, si elle se concrétise, laissera des traces profondes dans les habitudes… et dans les caisses.