En octobre 2017, #MeToo déferlait sur les réseaux sociaux. Des milliers de femmes ont depuis témoigné, libérant la parole sur les violences sexistes et sexuelles. Cinq ans plus tard, le mouvement a‑t-il vraiment eu les conséquences attendues dans le milieu étudiant ? Reportage à Lille.
En 2017, à l’aube de l’ère #MeToo, Blandine n’était qu’une jeune adolescente. Cinq après, si les langues se sont déliées, sa charge mentale, elle, n’a pas changé. « J’ai déjà vécu plusieurs agressions et le comportement oppressant des frotteurs dans les transports » admet-elle. Des transports devenus au fil du temps, un lieu dangereux où les attouchements sont fréquents. Pour Garance, étudiante en première année de Gestion prépa, l’augmentation du flux dans le métro « n’effraie pas les agresseurs. Je suis souvent collée ». En début d’année, un homme s’installe à côté d’elle, lui caresse la main en la regardant fixement. Tétanisée par la situation, Garance ne voit toujours pas de changement depuis le début du mouvement Me Too.
Un fort sentiment d’insécurité pour les étudiantes
Se balader dans la rue, prendre les transports ou sortir prendre un verre n’est pas toujours un moment agréable pour les jeunes étudiant(es). Si le mouvement a fait réagir et a changé certaines mentalités, Camellia et Léa, étudiantes en Master de Droit, estiment que le chemin est encore long : « Je ne sors plus jamais seule en ville. »
« À plusieurs, on se sent plus rassurés. On s’accompagne partout et on partage notre localisation en permanence » concèdent les deux amies.
« L’effet de groupe »
Pour Léa : « ce n’est même pas une question de physique. Les agresseurs me voient comme un bout de viande. » Camellia, elle, explique que des actes déplacés arrivent tous les jours. Un mépris pour la femme au quotidien selon elle « Si ça ne m’arrive pas de me faire mater ou toucher dans une journée, c’est un exploit. »
De son côté, Blandine fait face aux regards insistants et aux voitures qui ralentissent à côté d’elle dans la rue et regrette « l’effet de groupe. » Si elle ne veut pas mettre tous les hommes dans le même panier, l’étudiante se méfie de tous. « Les hommes se plaignent qu’on ne leur fait pas confiance mais les faits sont là et on a de réelles raisons de se méfier. »
Un léger changement dans la continuité
Le tabou autour du harcèlement moral et sexuel semble être tombé. Notamment chez les hommes. Pour Martin et son groupe, leur approche à changer. Ils estiment prendre plus de pincettes dans leur relation avec une femme. Et revendiquent les études supérieures comme un moyen de prendre plus conscience des choses : « On se fait notre propre éducation. On a grandi en tant qu’hommes avec ce mouvement. C’est important d’en parler au quotidien et pas seulement quand il y a des débordements. »