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    Les jeunes militants de parti politique : une espèce en voie de disparition ?

    Présents à la mani­fes­ta­tion pari­sienne du samedi 21 janvier contre la réforme du système de retraite, les orga­ni­sa­tions de jeunesse des partis poli­tiques de gauche et des syndicats étudiants marquent le coup. Pourtant, les jeunes engagés au sein des partis se font de plus en plus rare.

    Il s’a­gis­sait d’une mani­fes­ta­tion organisée par et pour eux. L’appel à la « Marche pour nos retraites » a été l’i­ni­tia­tive de multiples orga­ni­sa­tions de jeunesse tels des syndicats étudiants et lycéens (L’Alternative, la Fédération Indépendante et Démocratique Lycéenne, Voix Lycéenne) comme des mou­ve­ments de jeunesse de partis poli­tiques de gauche et d’extrême-​gauche (les Jeunes éco­lo­gistes, Jeunes insoumis⋅es, NPA Jeunes, entre autres). En plus d’eux, des élus de la NUPES, plus par­ti­cu­liè­re­ment de la France Insoumise mais aussi d’autres orga­ni­sa­tions poli­tiques et syndicales.

    Sur un camion, ils se sont succédé pour exhorter la foule : de Louis Boyard, 22 ans, ancien syn­di­ca­liste lycéen, à Olivier Besancenot, candidat de la LCR (ancien nom du NPA) en 2002 et 2007, en passant par Sandrine Rousseau d’Europe Écologie Les Verts et Jean-​Luc Mélenchon. Difficile de ne pas voir une redite de la mobi­li­sa­tion du jeudi 19, à peine deux jours avant, qui avait rassemblé dans la capitale l’en­semble des partis de gauche et d’extrême-​gauche ainsi que l’es­sen­tiel des syndicats. Si la mani­fes­ta­tion était à l’i­ni­tia­tive des jeunes engagés d’or­ga­ni­sa­tions diverses c’est surtout la France Insoumise qui a com­mu­ni­qué et organisé l’é­vè­ne­ment. À l’arrivée aux alentours de la place de la Bastille, l’avenue Daumesnil est com­plè­te­ment coupée par la police et la gen­dar­me­rie : des dizaines de bus sont arrêtés les uns à la suite des autres. En des­cendent des militants, prin­ci­pa­le­ment insoumis, mais aussi des éco­lo­gistes et d’autres personnes non affiliées. Venus de toute la France, ces bus ont été affrétés par le mouvement politique de Jean-​Luc Mélenchon : on y retrouve des militants venus de Brest. On ne peut pas les rater : ils prennent la pose pour la photo derrière une banderole « Finistère Insoumis » et agitent des drapeaux bretons. De même, ce sont surtout des per­son­na­li­tés poli­tiques de la France Insoumise qui étaient présents avec les jeunes : le député de la Somme François Ruffin (affilié à LFI), le député du Val-​d’Oise Carlos Bilongo. C’est peut-​être l’im­por­tance de cette présence insoumise qui a poussé les Jeunes socia­listes et les Jeunes com­mu­nistes à ne pas par­ti­ci­per à la manifestation.

    Le doute partisan de la jeunesse

    L’importance de l’or­ga­ni­sa­tion de la France Insoumise n’a pas su cacher un fait évident : les mani­fes­tants parisiens étaient bien moins présents que le jeudi 19. Se révèle alors un mouvement de fond étudié récemment par l’Institut Montaigne, la politique partisane intéresse de moins en moins les jeunes. Les cher­cheurs Olivier Galland (directeur de recherche émérite au CNRS spé­cia­lisé dans la jeunesse) et Marc Lazar (pro­fes­seur d’his­toire et de socio­lo­gie politique à Sciences Po Paris) ont mis au jour un paradoxe : la jeunesse se sent de plus en plus concernée par les questions de société mais se désaf­fi­lie mas­si­ve­ment. 64 % des 18 – 24 ans montrent des signes de désaf­fi­lia­tion, en ne sachant pas se situer sur l’échelle gauche-​droite ou en ne sachant pas indiquer un parti avec lequel ils se sentent proches, contre 40 % de leurs parents. Les jeunes engagés dans un parti ou un syndicat présents à la marche sont donc mino­ri­taires dans la société.

    Axel et Audrey des Jeunes éco­lo­gistes sont venus de Lille pour mani­fes­ter. © Ferdinand Chenot

    Axel, 19 ans, fait partie des Jeunes éco­lo­gistes de Lille. Un drapeau de son mouvement à la main, il explique qu’il est motivé parce que, à ses yeux, « l’enjeu est social et éco­lo­gique. On dit à nos parents qui ont bossé toute leur vie à 10 ans de leur retraite qu’ils partiront plus tard alors qu’ils ont cotisé ». Il a rejoint le mouvement à 18 ans, peu avant l’é­lec­tion pré­si­den­tielle. Il reconnaît que le nombre de jeunes engagés au sein d’un parti diminue : « il y a une baisse de confiance envers les per­son­na­li­tés poli­tiques, il y a donc par consé­quent une baisse du nombre de jeunes engagés. Notre rôle à nous, justement, c’est de faire pression sur les orga­ni­sa­tions natio­nales. La jeunesse a l’im­pres­sion qu’on ne l’écoute plus, on doit lui redonner confiance. Et s’ils n’é­coutent pas, on crie ».

    Cette baisse du nombre de jeunes dans ces mou­ve­ments est genrée. Si l’Institut Montaigne estime que les jeunes femmes sont « à l’avant garde sur beaucoup de questions poli­tiques et socié­tales », elles ont plus de mal à se faire leur place dans un monde militant qui se conjugue géné­ra­le­ment au masculin. Une militante d’une orga­ni­sa­tion de jeunesse témoigne en déclarant que dans son bureau local, le nombre total de militants a dû être réduit car il ne parvenait pas à faire respecter la parité à laquelle il s’attachait.

    Lia, 23 ans, du Parti Ouvrier Indépendant (parti politique trots­kyste), tient à nuancer l’idée d’un désen­ga­ge­ment géné­ra­lisé de la jeunesse : « Avec la pré­si­den­tielle, on voit des jeunes venir. Avec la mobi­li­sa­tion contre la réforme des retraites, on ne voit pas ces nouveaux engagés repartir. Depuis avril 2022, le nombre de jeunes militants ne baisse que très fai­ble­ment. Les jeunes se mobi­lisent surtout par réaction ».

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