Après 711 jours de captivité, Olivier Dubois, journaliste correspondant au Mali, a finalement retrouvé sa liberté. Détenteur du record de la plus longue captivité depuis la prise d’otage au Liban dans les années 80, il était fait prisonnier depuis avril 2021 par un groupe djihadiste malien. Alors que tous se réjouissent de sa remise en liberté, les raisons de sa captivité demeurent inconnues pour beaucoup.
Lundi 20 mars, 12h10, aéroport de Villacoublay, avion bleu blanc rouge, sac à dos et sourire : Olivier Dubois vient de recouvrer sa liberté. Détenu depuis le 8 avril 2021 par un groupe djihadiste intitulé GSIM, il retrouvait ce lundi le sol français. Une fois la joie et le soulagement passé, les raisons de son enlèvement restent floues pour la plupart. Ainsi, pourquoi et comment Olivier Dubois s’est-il retrouvé captif d’un des groupes terroristes malien ?
En 2021, Olivier Dubois est depuis 15 ans journaliste indépendant français qui vit et travaille au Mali. Le 8 avril, il prend l’initiative de se rendre à Gao, pour interroger un chef djihadiste. Dès lors, sa famille ne dispose plus d’aucune nouvelle de lui. 5 jours plus tard, son numéro WhatsApp devient de nouveau actif le temps de quelques minutes avant de se déconnecter définitivement. Le 5 mai, il publie une vidéo pour annoncer sa captivité : le GSIM soit le Groupe de Soutien à l’Islam et aux Musulmans, le détient.
Olivier Dubois : victime de l’opération Barkhane au Sahel
Les principaux enjeux de cette prise d’otage reposent sur les relations Franco-Maliennes. Depuis Janvier 2013, l’armée française est active au Mali dans le cadre de l’opération Barkhane au Sahel. Si une politique interventionniste française est déclenchée, c’est parce que 9 mois plus tôt, le Nord du pays est, suite à une rébellion Touareg, tombée aux mains de groupes djihadistes liés à Al-Quaida.
Du 17 janvier 2012 au 6 avril 2012, le nord du pays est le théâtre d’un conflit armé entre les rebelles Touaregs du mouvement national pour la libération de l’Azawad dit MNLA, l’armée malienne et le mouvement salafiste d’Ansar Dine. Le MNLA revendique l’autodétermination de l’Azawad soit des régions de Kidal, Tombouctou et Gao. Alors que le gouvernement malien, défend l’intégrité du territoire et refuse de céder aux revendications, le mouvement islamique d’Ansar Dine défend l’instauration d’une République islamique avec instauration de la charia.
Les aspirations djihadistes et Touaregs convergent ; tant qu’elles mènent à l’insurrection malienne. Une fois la révolte enclenchée, les islamistes parviennent à repousser les rebelles Touaregs des principales villes de l’Azawad pour mettre en place la loi Islamique. Le peuple nomade s’est allié au mouvement d’Ansar Dine pour défendre leurs intérêts propres, mais les djihadistes les ont manipulés pour parvenir à leurs fins. Après le Nord, les djihadistes veulent désormais s’avancer vers le sud du pays, notamment vers la capitale Bamako et la prendre d’assaut. L’enlèvement d’Olivier Dubois est la conséquence de cette guerre de territoires : le GSIM a besoin de financer ses activités au Sahel.
Olivier Dubois, seul au Sahel
Depuis février 2022, la France, à l’image du Royaume-Uni ou de l’Allemagne, s’est retirée de l’opération Barkhane au Sahel. Pour justifier cette retraite, les pays de la coalition dénoncent l’ambiguïté et l’hostilité de la junte au pouvoir. Les autorités maliennes adoptent des stratégies et des objectifs qu’elles ne communiquent pas aux armés alliés ce qui empêche la coopération.
Outre la dimension géopolitique de cette décision, Olivier Dubois ne disposait plus depuis février, d’aucun soutien français au Mali. En France, pourtant, famille, ONG et médias continuaient d’œuvrer en faveur de sa libération. Un appel lancé par Reporter Sans Frontière avait en octobre 2022 réussi à réunir les signatures de plus de 40 rédactions.
Enfin, c’est à force de soutien qu’Olivier Dubois est réapparu, comme il avait disparu. Lundi 20 mars, aéroport de Niamey, midi, en compagnie de Jeffery Woodke, enlevé il y a plus de 6 ans, sac à dos et sourire : le calvaire peut prendre fin.