Depuis le 18 octobre, on peut retrouver au cinéma le dernier long-métrage de Martin Scorsese, Killers of the Flower Moon. Adapté du roman du journaliste David Grann La Note américaine, ce film de 3h26 nous plonge au cœur de l’histoire de la tribu Osage. Un bel hommage pour cette tribu et une volonté pour son réalisateur de mettre en avant une histoire méconnue.
Il y a eu en 2019 Le Cas Richard Jewell, un long métrage mettant en scène l’histoire d’un agent de sécurité suspecté de terrorisme. Le vrai Richard Jewell sera blanchi trois mois plus tard après avoir subi un véritable acharnement médiatique et judiciaire. Oppenheimer racontait l’histoire de Robert Oppenheimer et de sa bombe atomique qui a fait basculer les Etats-Unis et le monde entier. Puis, Martin Scorsese déclare vouloir s’attaquer au péché originel de l’Amérique. Cela donnera naissance à Killers of the Flower Moon. Une référence à la Fleur de lune qui poussait dans les prairies des terres de la tribu en Oklahoma, un signe d’abondance pour les Indiens.
Qui sont les Osages ?
Originaires du fleuve Mississippi et de la vallée de la rivière Ohio, les Osages ont été déplacés contre leur gré dans les terres de l’Oklahoma. Pauvres comme la plupart des tribus amérindiennes, tout s’inverse lorsque du pétrole est découvert sur leurs terres. La tribu devient alors le peuple le plus riche par individu au monde. Cette nouvelle abondance suscite alors la convoitise des pionniers blancs. Un véritable système de spoliation se met en place. Le gouvernement américain déclare les Osages incompétents. Les hommes épousent des membres de la tribu afin de récupérer leur richesse. La situation s’aggrave lorsque de 1921 à 1925 une série de meurtres frappe ce peuple. Baptisée le règne de la Terreur, ce sera le Bureau of Investigation, l’ancêtre du FBI qui finira par mettre en lumière toutes ces machinations.
Un casting 5 étoiles… mais pas seulement !
Côté casting, deux camps s’opposent. D’un côté, les grands noms. Robert de Niro dans le rôle de William King Hale, un riche propriétaire ayant mis en place un système de spoliation qui dure depuis des décennies. Leonardo Di Caprio, grimé en Ernest Buckhart, vétéran de la Première guerre mondiale un peu benêt qui finira par commettre les pires choses au service de son oncle William Hale. De l’autre côté, Martin Scorsese choisit de s’appuyer sur des acteurs amérindiens, dont Lily Gladstone. Son personnage de Mollie Kyle incarne à elle seule toute une communauté riche de traditions, de préceptes et de malchances. Révélation de ce film, elle concourra dans la catégorie de la meilleure actrice pour les Oscars, pouvant devenir la première femme d’origine amérindienne à remporter cette récompense.
Un western au cœur de l’histoire
Ce film a tout d’un ambitieux western : des hommes blancs dans un paysage austère, une menace incarnée par les Indiens et une femme sage et forte qui finit par épouser un des personnages principaux. Mais ce n’est pas son seul point fort. La photographie signée Rodrigo Prieto, détaillant les paysages de l’Oklahoma ainsi que les coutumes des Osages rajoute au film une dimension documentaire. Il y a aussi l’histoire d’amour entre Mollie et Ernest qui finira par détruire la jeune femme. Enfin, le film soulève des problèmes vieux comme le monde : le patriarcat et la colonisation. Dès les premières minutes, Mollie se présente comme incompétente face à l’homme blanc. Tout un symbole pour l’une des femmes les plus riches au monde. À travers elle et son réalisateur, c’est un regard lucide sur le sang autochtone versé pour bâtir l’Amérique, un massacre dont les manuels d’histoire ne parlent pas. Scorsese s’impose en prenant le temps de raconter une histoire aussi complexe. Il a notamment fait appel à des membres de la communauté pour respecter au mieux leurs traditions et traiter leur histoire avec respect, dignité et authenticité.