Le 16 octobre 2020, Samuel Paty, enseignant d’histoire-géographie au collège de Conflans-Sainte-Honorine, dans le Val-d’Oise, se fait décapiter. Son crime : montrer des caricatures de Mahomet à ses élèves dans le cadre d’un cours sur la liberté d’expression. Deux ans après, les établissements du secondaire l’honorent en mettant l’accent sur la créativité.
Deux ans après l’assassinat de Samuel Paty, enseignant d’histoire-géographie au collège, tous les établissements du secondaire de France ont été appelés à honorer sa mémoire. Les écoles sont silencieuses, durant une minute, les 14 ou 17 octobre, les deux journées officielles d’appel à mémoire. La minute de silence, bien qu’importante soit-elle, n’est, cependant, pas l’unique façon de se souvenir de Samuel Paty. Professeurs et élèves ont puisé dans leur créativité afin de rendre la journée de mémoire plus instructive encore. La volonté est d’étendre la mémoire de Samuel Paty sur du long terme, et d’amener les élèves à la discussion sur les valeurs de la République.
Lille court après le temps
Dans la métropole lilloise, on observe la créativité, mais surtout le manque de temps. Alice, la professeure-documentaliste alternante, se désole de ne pas avoir mis en place quelque chose avec ses collègues au CDI par manque de temps. Sa position d’alternante l’empêche d’être à l’initiative de projet conséquent au sein de son établissement. Au lycée Européen Thérèse d’Avila à Lille, les élèves de première, en épreuves blanches de spécialité, n’ont pour aucun participé à quelques actions en mémoire de Samuel Paty. Les élèves à la sortie du lycée étaient pour certains quelque peu étonnés. Ils étaient au courant de l’appel à mémoire et trouvent cela dommage que leur niveau de classe n’ait pas été convié à se recueillir, ne serait-ce qu’une minute avant le début des épreuves. Ils espèrent cependant parler de liberté d’expression avec leurs professeurs dans les jours à venir.
L’Alsace créative
En Alsace, bien que la loi de laïcité de 1905 ne s’applique pas, les idées ont fusé dans les esprits afin de rappeler l’importance de la liberté d’expression et de la laïcité. Isabelle Jund, professeure de lettres au lycée Bartholdi, a traité vendredi avec ses élèves de l’article « fanatisme » du dictionnaire philosophique de Voltaire et la prière à Dieu qui permet de réconcilier tous les êtres humains. Il lui a semblé nécessaire de faire ce travail malgré le fait que l’établissement avait communiqué sur l’événement uniquement aux professeurs d’histoire et d’enseignement civique et moral. Cristel Meyer-Cluet, professeure d’histoire-géographie, a préféré faire étudier les pages de Une de Charlie Hebdo et l’édition spéciale du journal « Dieu créa le terrorisme », parue en septembre 2021.
Un prix Samuel Paty
Samedi, un premier prix au nom de l’enseignant a été remis à une classe de quatrième du collège Marie-Mauron de Pertuis dans le Vaucluse. Les élèves du collège ont présenté un journal de bord répondant à la question : « Sommes-nous toujours libres de nous exprimer ? » et mettant en avant le devoir de mémoire. Le prix est à l’initiative de l’association des professeurs d’histoire-géographie désireux d’expliquer aux élèves l’importance de la liberté d’expression à l’école et en société.
Un contexte épineux autour de la laïcité
L’appel à mémoire s’inscrit dans le contexte un peu particulier de la résurgence des atteintes à la laïcité dans de nombreux lycées et collèges. En septembre, on comptait 313 faits d’atteinte à la laïcité, principalement dans les lycées. Jusqu’alors, la majorité des signalements était recensée dans des collèges. La plupart du temps, il s’agit de port de tenues religieuses alors que la loi sur l’application du principe de laïcité dans les établissements du secondaire de 2004 est claire quant aux règles à respecter : « Dans les écoles, les collèges et les lycées publics, le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit ».