Qui pourrait se douter que l’homme au centre de cette photo, brandissant sa tronçonneuse devant de gros drapeaux, s’agit du nouveau président argentin ? Sa férocité, ses phrases outrancières et les images de sa campagne ont énormément choqué mais aussi séduit sur les réseaux sociaux. Ce sont aussi les ingrédients qui lui ont valu la victoire.
« C’est le plan tronçonneuse. Parce qu’on va découper à la tronçonneuse les dépenses publiques. Les politiques tremblent. Ils mentent aux gens, cette bande de criminels. Ces voleurs. Ils n’aiment pas notre plan parce qu’après ils ne pourront plus piller. Ils devront travailler sans voler. Ils vont devoir trimer comme des personnes honnêtes. »
Petite présentation de l’homme tronçonneuse
Pour ceux qui auraient raté les articles en une parus depuis dimanche sur l’énergumène, voici Javier Milei. Économiste de 53 ans, classé à l’extrême droite pour sa radicalité dans la doctrine libérale. France Inter a même repris toutes ses lettres de marques : « minarchiste, anarcho-capitaliste, libéral conservateur, ultralibéral », et un nouveau terme qu’on laissera à Nicolas Demorand, « OGM politique ».
Javier Milei est le fondateur en 2021 de « La liberté avance », son parti libéral-libertaire. Il dénonce une caste politique argentine qu’il juge « parasitaire ». Et il remporte haut la main le long processus électoral en Argentine, face aux deux partis séculaires pourtant installés depuis plusieurs décennies. Et ceci avec une existence politique de seulement trois ans.
Revenons rapidement sur sa fin de campagne, que son avènement n’aura pas tardé d’écraser par l’étonnement général de la presse dans le monde.
Un premier revers après le rouleau compresseur
Nous sommes le 22 octobre, au premier tour de l’élection présidentielle argentine. La classe politique, comme la population, retiennent leur souffle, face au potentiel raz-de-marée libertarien. Rien n’y fait, Sergio Massa, candidat de la droite péroniste (centre-gauche) obtient presque 37% des voix, devant Javier Milei, ce dernier avec 30% des votes. Le monstre Milei, amplifié par la bulle internet, ne semble plus inarrêtable.
Les deux finalistes pour le second tour se sont affrontés dans un débat télévisé le 12 novembre. Si seul le verbe était autorisé, il se peut qu’il ait été un peu cru. Les attaques directes ont commencé à fuser des deux côtés, en s’en prenant à leur programme comme à leur stabilité émotionnelle.
Le Lion et le Canard
Certains commentateurs et médias ont fait vœu pieux de voir Javier Milei perdre, « Javier Milei K.O » titre le Courrier International, « Sergio Massa prend le dessus » insiste les Échos. Cependant la plupart s’accordent à dire que la partie va être très serrée, et se jouer à la voix près.
D’autant que Javier Milei, que l’on surnomme « le Lion » dans la logique de la chaîne alimentaire libérale (Des lions menés par des ânes, Charles Gave), a reçu un soutien de choix dans l’entre-deux tours. Il s’agit de Patricia Bullrich, candidate centre-droit de « Juntos por el Cambio » (« Ensemble pour le changement »), arrivée troisième au premier scrutin avec 24% des suffrages. C’est un réservoir de voix énorme pour Javier Milei, et une alliance qui défait les campagnes de diabolisation organisées autour de son personnage. Patricia Bullrich étant surnommée « el Pato » (« le canard »), la communication Milei s’est empressée de faire tourner l’image.
Le lion devra cependant composer avec le canard, sinon il risque de s’esseuler au Parlement, qui ne compte pour le moment qu’une trentaine de députés « La Liberté avance ».