Six mois, c’est le délai donné par le Conseil d’État à la France pour s’aligner sur le droit européen qui fixe à 800 le nombre de cigarettes qu’il est possible de rapporter entre deux pays européens. Une aubaine pour les fumeurs nordistes mais pour certains buralistes de la région, la pilule est difficile à avaler.
Le 29 septembre 2023, le Conseil d’État a demandé au gouvernement français de s’aligner sur le droit européen qui fixe à 800, soit quatre cartouches, le nombre de cigarettes qu’il est possible de rapporter au sein de l’Union Européenne contre 200 cigarettes actuellement (soit une seule cartouche). Derrière cette décision se cache un étudiant de 22 ans, Sami Gam, scolarisé à Sciences-Po, qui a proposé l’idée il y a neuf mois après avoir lu des articles de presse. Selon lui, c’est un combat contre l’illégalité : « l’État doit respecter les obligations qui lui incombent. Pour moi, c’était normal de combattre cette illégalité, le fait est que le droit français était contraire à la réglementation européenne sur ce point » a t’il déclaré dans les colonnes de Franceinfo.
« On avait pas besoin de ça »
Pour les consommateurs de tabac, l’idée est forcément accueillie à bras ouverts, mais les buralistes locaux, eux, font grise mine : « Le tabac, c’est un peu notre ADN. Cette décision pourrait faire baisser la fréquentation dans nos bureaux de tabac car les gens vont se ruer vers la Belgique pour ramener plus de cigarettes. On n’avait franchement pas besoin de ça », déplore un buraliste du Vieux-Lille. Car oui, pour les fumeurs, cette décision pourrait leur faire gagner du temps et de l’argent : « Au lieu de venir tous les mois, on viendra tous les trois ou quatre mois. Et vu le prix de l’essence en ce moment, c’est plutôt pas mal », se réjouit Louise, commerçante, qui a l’habitude de se rendre dans le plat pays pour acheter son tabac.
Pour les étudiants lillois, pas vraiment d’impact
« Quadrupler les cartouches ? Mais c’est énorme ! », lance Youssef, buraliste de 25 ans à la tête d’un établissement à proximité de l’université catholique de Lille. « Les bureaux de tabac du centre de la France n’auront pas de soucis à s’y faire, par contre pour nous qui sommes à proximité de la frontière belge, ça ne va pas être la même chose. » Néanmoins, la clientèle, principalement étudiante, « Je n’ai pas de voiture et me rendre en Belgique c’est trop compliqué, donc je vais continuer d’acheter mes cigarettes ici », explique Laurie, étudiante en troisième année de droit. Mais d’autres buralistes de la région pensent que cette décision est aux antipodes de ce qu’il se passe actuellement : « Ça ne va rien changer car aujourd’hui j’estime qu’il y a trop peu de contrôles de douane. On peut très bien aller en Belgique et revenir avec cinq, dix ou vingt cartouches de cigarettes. », regrette le gérant du National, rue Gambetta, à Lille. Une rencontre entre la confédération des buralistes et le ministère des Comptes publics sera bientôt organisée à Paris pour aborder l’ensemble des problèmes de la filière.