Aussi appelée bière artisanale, la craft Beer accompagne les soirées des Bruxellois depuis plus de dix ans. Dans ce pays où la bière est la boisson nationale, elle a vite trouvé une clientèle fidèle. Pour autant, le marché prolifique commence à saturer.
Dans le quartier de Saint-Gilles à Bruxelles, un local aux allures de laboratoire concocte depuis plus de huit ans une boisson emblématique pour le peuple belge. Fondée en 2016 par Arthur Ries et son père, la micro-brasserie Beerstorming est une pionnière dans le domaine de la craft beer. Perdu au milieu des étagères remplies de fioles et de flacons, le jeune trentenaire vêtu d’un bleu de travail revient sur le succès de la craft beer. Après des années de recherche, père et fils décident d’aller à contre-courant des brasseries traditionnelles. Le principe est simple : comprendre les goûts des consommateurs avant de leur vendre une bouteille.
Comprendre les goûts de chacun
« Les Belges boivent de la bière depuis des siècles mais ne la connaissent pas » déclare-t-il. Pils, Ipa, Brewer ou encore Sour, tant de variétés que certains palais n’arrivent pas à différencier. Beerstorming instruit ses consommateurs avec un concept bien ficelé : les clients produisent leurs propres bières. Une philosophie qui assure depuis huit ans la pérennité de la brasserie familiale. « Nous faisons des ateliers où chacun peut créer sa bière selon ses goûts. Tous les trois mois, nous organisons un concours qui détermine quelle bière nous allons mettre en vente » explique-t-il.
Les microbrasseries dans la tourmente
« C’est une tendance qui dure depuis cinq ans. Cela n’a pas que des côtés positifs » confirme Arthur Ries. Le trentenaire a pu voir au fil des années la concurrence s’imposer. « Nous étions deux, trois il y a dix ans. À Bruxelles, on compte aujourd’hui plus d’une vingtaine de micro-brasseries » continue-t-il. Avec tant d’offres, le marché sature. L’année 2023 est la première qui voit son nombre de micro-brasseries diminuer considérablement. Malgré son aspect local et esthétique, la craft beer trinque par son manque de diversité. La clientèle visée en fait un marché de niche qui a du mal à attirer de nouveaux consommateurs. « Il y a un réel écart générationnel. Un quinquagénaire n’a pas connu la craft et boit ce qu’il connait depuis 35 ans » se désole Arthur Ries. La craft beer peine à se détacher de son image jeune et détendue plus communément catégorisée comme « hipster ».
La France ne sait pas boire
Si la bière est une boisson nationale pour la Belgique, le plat-pays a un avis bien tranché sur la manière dont les Français consomment le breuvage houblonné. L’hexagone fait figure de mauvais élève aux yeux des zythologues bruxellois. « En France, la bière est la boisson du peuple. En Belgique, cette dernière est noble, on la boit dans des verres élégants » analyse Magali De Vinck, zythologue indépendante à Bruxelles. La Belgique peut se vanter d’avoir compris depuis des siècles les nuances de cette boisson. Un art qui commence à traverser la frontière, en témoigne
le développement de micro-brasseries en France.