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    L’avenir en poin­tillés des mineurs exilés de Lille

    Depuis plusieurs mois, chaque semaine, les Mineurs Non Accompagnés (MNA) mani­festent par dizaine, sous les fenêtres de l’hôtel du dépar­te­ment du Nord. Confrontés à une précarité extrême au sein du campement de Bois-​Blancs, ils reven­diquent un héber­ge­ment stable ainsi qu’un accom­pa­gne­ment adapté. Le Conseil dépar­te­men­tal s’avoue dépassé.

    Je voudrais aller à l’école 

    Souvent marqués par la misère éco­no­mique et les violences intra-​familiales, les MNA de Bois-​Blancs partent avec un but commun : s’assurer un avenir stable en Europe. Principalement ori­gi­naires d’Afrique de l’Ouest (70%), ils arrivent seuls en France se heurtant à de nombreux obstacles, parmi lesquels : l’accès à l’éducation, à la santé ainsi qu’à un suivi psy­cho­lo­gique. La barrière de la langue et l’isolement social com­plexi­fient cette inté­gra­tion. En témoigne Tierno, mineur de 15 ans, pour qui l’apprentissage de la langue française est un objectif. Lors de notre visite, ce jeune Guinéen ques­tion­nait régu­liè­re­ment les bénévoles pour obtenir des infor­ma­tions sur la sco­la­ri­sa­tion. « Je voudrais aller à l’école », affirme-​t-​il, démon­trant une envie pressante de reprendre les cours. Toutefois, par manque de papiers, sa situation est bloquée. En contact avec sa famille restée en Guinée, celle-​ci lui enverra pro­chai­ne­ment les documents nécessaires.

    Les MNA, déjà devant la pré­fec­ture du Nord, le 4 avril dernier. ©Gwendydd Vaillié

    Les enjeux huma­ni­taires et institutionnels

    « Le principal défi des MNA repose sur la recon­nais­sance de leur statut de mineurs », déclare Étienne, bénévole retraité chez Utopia 56. Être reconnu en tant que mineur, demeure une condition essen­tielle pour accéder à une prise en charge par l’Aide sociale à l’enfance (ASE). Or, les pro­cé­dures actuelles de véri­fi­ca­tion d’âge, gérées par le dis­po­si­tif EMA (Évaluation Mise à l’Abri), retardent souvent leur pro­tec­tion. Les éva­lua­tions, effec­tuées par des édu­ca­teurs spé­cia­li­sés et des juristes, portent sur « le parcours migra­toire, la sco­la­ri­sa­tion et la com­po­si­tion familiale des présumés mineurs », confie Nadia, bénévole active. Mais la grande majorité des entre­tiens débouche sur une réponse négative. Les jeunes font donc un recours auprès du juge des enfants. De là, s’en suit un long processus qui peut s’étendre sur une année complète. Pendant cette période tran­si­toire, les MNA n’ont plus de pro­tec­tion offi­cielle. Pourtant, depuis deux ans et demi, « 80 % des jeunes qui font appel sont fina­le­ment reconnus mineurs, soit 8 jeunes sur 10 », rappelle Étienne, s’appuyant sur des chiffres officiels d’Utopia 56. Cette sta­tis­tique démontre une faille struc­tu­relle : « ils vivent dans la rue pour rien », s’exaspère Nadia. C’est pourquoi, chaque semaine, les jeunes se rendent devant le dépar­te­ment du Nord. Leurs objectifs ? Dénoncer leurs condi­tions de vie précaires et réclamer de meilleures mesures de pro­tec­tion. « Il faut que cela fasse l’objet d’une loi », insiste le retraité, afin de rappeler que l’instauration d’une pré­somp­tion de minorité garan­ti­rait une pro­tec­tion temporaire.

    Une res­pon­sa­bi­lité partagée entre l’état et le dépar­te­ment 

    « Depuis le 21 septembre, ça commence à bouger », indique Étienne. À l’occasion des Journées du Patrimoine, le campement des MNA a été ouvert au public et notamment aux élus, révélant la dureté de leur quotidien. Le premier adjoint au maire de Lille, Arnaud Deslandes, présent à l’évènement, a ainsi inter­pellé le Conseil dépar­te­men­tal du Nord dans une lettre publiée sur X, le 20 septembre. Il réaffirme que la mairie a collaboré avec des asso­cia­tions pour garantir un accès à l’eau et améliorer les condi­tions sur place, tout en sou­li­gnant les limites de son action. La ville appelle le dépar­te­ment du Nord à prendre ses res­pon­sa­bi­li­tés « pour assurer la mise à l’abri des jeunes » et demande l’intervention de l’État pour apporter des solutions concrètes et durables. Le dépar­te­ment du Nord reconnaît la com­plexité de la situation et insiste sur ses limites struc­tu­relles. L’afflux de demandes semble dépasser ses capacités. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : le Nord est le dépar­te­ment qui accueille le plus de mineurs étrangers en France. En 2023, 765 MNA lui ont été confiés sur décision de justice. 

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