Votée à l’aide du 49.3 début février et finalement suspendue, cette réforme prévoit l’abaissement du seuil d’exemption de TVA, passant de 37 500 € à 25 000 € du chiffre d’affaires. Une annonce contre laquelle Fabien Mousset, auto-entrepreneur, s’insurge.
Ils sont vent debout, certains craignent de devoir fermer boutique, d’autres d’avoir la « corde au cou ». Selon la Fédération nationale des auto-entrepreneurs, la mesure touchera environ 250 000 auto-entreprises. Votée dans le cadre de la Loi des Finances 2025 et reportée temporairement sous la gronde des organisations professionnelles ainsi qu’une partie des responsables politiques, la réforme a agi comme une onde sismique. Avant l’article 10 tant critiqué, le montant de la TVA (20 %) était fixé à partir d’un chiffre d’affaires annuel de 37 500 euros. Après un passage en force à l’aide du 49.3, le gouvernement a réduit le seuil à 25 000 euros, l’objectif étant de réduire les inégalités entre grandes et petites entreprises. Et de générer 400 millions d’euros de recettes pour l’Etat. Fabien Mousset, auto-entrepreneur depuis 2023, s’insurge : « Mais à quoi joue le gouvernement ? Cette mesure est inconcevable, l’Etat nous met la corde au cou ! L’absence de TVA, c’est un argument pour le client. Avec cette réforme, on va devoir augmenter nos tarifs pour pouvoir absorber la TVA, ça va les faire fuir ! »
« Selon la Fédération nationale des auto-entrepreneurs, la mesure touchera environ 250 000 auto-entreprises. »
« Enterrer les patrons »
Fabien Mousset travaille chez lui, à Hem, dans son garage aménagé où sont accrochés un grand nombre d’outils plus coupants les uns que les autres. « Il y a du matos ici, je ne sais même plus pour combien. Cela fait longtemps que je les collectionne. » Mais Fabien n’est pas juste un collectionneur, c’est avant tout un auto-entrepreneur spécialisé dans le travail du bois. Depuis 2023, le quadragénaire d’origine belge est à la tête de son entreprise de menuiserie, « Famousse Wood ». « Travailler le bois est un grand plaisir, je m’amuse beaucoup. Ce que j’adore par-dessus tout, c’est rénover des anciens meubles, celui qui a une âme, une vie, une vraie présence, un cachet quoi ! », s’enthousiasme-t-il avec cet accent belge qui n’a de toute évidence pas disparu.

Depuis quelques semaines, Fabien touche du bois pour que la réforme soit définitivement abrogée. Plusieurs pétitions ont vu le jour, dont une a reçu plus de 30 000 signatures en moins de vingt-quatre heures. « Le gouvernement, on ne le comprend pas, vraiment. L’argent public, c’est si précieux, ils le jettent par la fenêtre et après nous demande à nous, auto et micro-entrepreneurs de faire des efforts. Ça va enterrer les patrons, c’est tout ce que ça va faire. »
Combines pour survivre
Les conséquences de cette réforme sont multiples, mais l’une d’entre elles pourrait bien amener à des « combines ». Grégoire Leclercq, président de la Fédération des auto-entrepreneurs, dit son inquiétude : « Ils vont se débrouiller de toutes les manières possibles pour cumuler avec du portage social, pour cumuler une deuxième auto-entreprise portée illégalement par le conjoint ou la conjointe, pour sous-déclarer une partie de ce chiffre d’affaires. Donc tout le monde va faire en sorte de s’échapper de ce plafond et de ne pas le franchir », prédit-il. D’autant plus que cette réforme se confronte à une conjoncture économique étonnamment positive. Le nombre d’auto-entrepreneurs et de micro-entreprises n’a jamais été aussi élevé depuis la création du statut il y a 15 ans : 716 194 immatriculations ont été enregistrées en 2024.