C’est officiel, mercredi 13 mars, la techno berlinoise vient d’être officiellement inscrite au patrimoine culturel immatériel de l’Unesco. Une reconnaissance nationale pour un genre musical encore considéré comme “sous-culture” en Europe.
La Conférence des ministres de la Culture des Landër allemand, organisée par la ministre d’État à la Culture Claudia Roth, s’est tenue mercredi 13 mars. Une réunion qui avait pour but d’étudier les propositions de 2023 pour élargir la liste nationale, illustrant la diversité de la culture allemande, auprès de l’UNESCO. Parmi ces demandes, celle de l’association allemande Rave The Planet (créateur de la Loveparad), souhaitant inscrire définitivement le mouvement techno au patrimoine immatériel du pays.
Bien plus qu’un son, un lien culturel.
Pour les initiés, la musique technotronique et électronique est diverse, dont les affluences et les styles diffèrent selon les pays ou les régions du monde. Si sa création remonte aux débuts des années quatre-vingt, à Détroit (puis Chicago), aux États-Unis, la techno berlinoise est aujourd’hui l’une des plus appréciées.
Alors divisée en deux, l’Allemagne découvre ce nouveau style hypnotique, disruptif, vers 1988 selon de nombreux spécialistes, notamment à Berlin. Disposant de nombreuses radios pirates, telles les stations DT64 ou Kiss FM, celles-ci jouent un rôle crucial dans la diffusion de ce genre musical. Ces stations fonctionnent en dehors des réglementations traditionnelles, offrant une plate-forme pour les artistes techno underground et émergents.
Selon l’historien et anthropologue, Sylvain Desmille, “ce dernier espace de liberté offert par les ondes, que nul ne pouvait contrôler, a permis une totale liberté de diffusion”. Les programmes de nuit, alors proposés par les stations de l’Ouest, étaient très écoutés par delà le mur. “La radio occupe une place assez importante du côté de Berlin-Est”, explique-t-il. Grâce à ce nouveau style musical, une jeunesse que tout oppose se retrouve unie. Lors de la chute du mur, la jeunesse berlinoise désireuse de faire table rase du passé, se retrouve autour d’un même son, une identité nouvelle bercée par un genre nouveau.
La reconnaissance d’une culture à part entière
L’inscription de ce genre musical est bien plus qu’une reconnaissance artistique d’un style de musique. Soutenue depuis 2021 par de nombreux Djs et personnalités de la nuit berlinoise, cette victoire symbolise l’importance d’une communauté, d’une identité, et surtout d’un courant artistique à part entière participant au rayonnement international de la capitale.
Cette inscription permettrait d’apporter d’avantages de subventions gouvernementales. Ces différents acquis sociaux et juridiques permettent ainsi de pouvoir établir définitivement des lieux emblématiques tels que la Berghain ou le Trésor (les plus anciens et célèbres clubs berlinois) au sein de patrimoine allemand. Mais aussi d’apporter une exigence supérieure et contrôlée sur l’ouverture et le maintien des clubs au sein de la capitale allemande.
La conférence des ministres de la Culture, en inscrivant la techno berlinoise sur cette liste, a souhaité reconnaître les valeurs que celle-ci incarne “telles que la diversité, le respect et l’ouverture d’esprit”. Cette annonce faite par les plus hautes autorités du pays permet définitivement de reconnaître la techno berlinoise, ses mouvements, ses artistes et sa communauté, comme un bien patrimonial et donc une des multiples facettes culturelles du pays. Une victoire pour Rave The Planet, dont l’organisation de la Loveparad, en août prochain, n’aura pas la même symbolisation.