À l’heure où le combat pour la libération de la parole des femmes est omniprésent dans nos sociétés, les vingt-sept états membres de l’Union européenne ne parviennent pas à trouver un accord sur la définition du viol.
En France, le viol est inscrit dans le Code pénal qui le définit par « tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, ou tout acte bucco-génital commis sur la personne d’autrui ou sur la personne de l’auteur par violence, contrainte, menace ou surprise ». L’article 222 – 23 du Code pénal le réprime de quinze ans de réclusion criminelle. À cela s’ajoutent des circonstances aggravantes : inceste, minorité de la victime, mutilations, usage d’une arme… Si le viol a entrainé la mort de la victime, la peine est de trente ans de réclusion criminelle.
Des chiffres alarmants
L’Union européenne souhaite émettre une directive sur les violences faites aux femmes. Rappelons tout d’abord les chiffres alarmants sur la condition des femmes en Europe. Selon le collectif belge contre les violences familiales et l’exclusion (CVFE), le tiers des femmes européennes a été victime de violences physiques ou sexuelles. C’est un phénomène de grande ampleur qui ne touche pas que la France.
En effet, une enquête a révélé que 13 millions de femmes ont été victimes de ces violences au cours des douze mois précédant le sondage, soit 7% des femmes de l’UE. « Les résultats donnent froid dans le dos », indique le collectif. Parmi les femmes ayant un partenaire, 22% ont subi des violences physiques et/ou sexuelles de la part de celui-ci depuis l’âge de 15 ans. Ces chiffres sont corroborés par le Haut Conseil à l’Égalité français.
C’est dans l’optique d’action et de protection des femmes que l’Union européenne tente de définir, de manière commune, le viol. La directive a été présentée le 8 mars 2022 par la Commission européenne qui souhaite « lutter efficacement contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique dans l’ensemble de l’UE ». Il s’agit de combler les lacunes des Etats en matière de protection mais aussi de prévention et de justice à l’égard des actes commis envers les femmes.
Une définition commune du viol abandonnée
Une mesure a donc beaucoup fait parler d’elle : la définition du viol. Comme souligné plus haut, la France définit le viol en englobant les aspects de menace, contrainte, violence ou surprise. Qu’est-ce qui changerait avec la définition proposée par la directive ? Le texte prévoyait d’introduire le défaut de consentement dans la définition du viol, en omettant le reste des aspects. C’est-à-dire, donc, de faire de l’absence de consentement le point central de la définition du viol.
Grâce à ce texte, l’Union européenne prévoyait de faire du viol un « eurocrime ». Cela viserait à harmoniser les législations nationales des Etats. Or, cette partie du texte en particulier ne fait pas l’unanimité chez les 27, et notamment en France.
Le gouvernement est très attaché à la définition française du viol, bien que celle-ci ne soit pas parfaite non plus. La France figure parmi les dix Etats qui se sont opposés à inclure le consentement comme point central dans la définition du viol. Le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti explique qu’inclure cette disposition reviendrait à « faire peser la preuve du consentement sur la victime ». La position d’Emmanuel Macron s’est vue très critiquée par les associations et certains eurodéputés, qui jugent que « l’opposition de la France constitue une mise en danger pour des millions de filles et de femmes ».
Le sujet reste au centre de débats. La définition de la France à elle seule ne suffit pas, mais la définition voulue par l’Union européenne ne suffit pas non plus. Il s’agirait d’inclure toutes les dimensions, toutes les notions, et tous les aspects qui englobent le viol, afin de trouver une définition hyper protectrice pour les personnes qui sont victimes de ce crime. En effet, la sénatrice Mélanie Vogel déplorait que le mot « consentement » ne soit pas inscrit dans la loi française.
Pour l’heure, la Commission européenne, le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne ont décidé d’exclure cette mesure du texte, qui a été validé ce mardi 6 février.