Démocratisée en Belgique dans les années 1920, la bande dessinée a traversé les époques et continue aujourd’hui de séduire les lecteurs. Quelles sont les évolutions qui lui ont permis de rester d’actualité ?
En 2023, la bande dessinée occupait la deuxième place du marché belge de l’édition après la littérature classique. Le neuvième art reste un pilier solide de la culture belge, qui ne cesse de se réinventer depuis un siècle.
Le roman graphique : réelle innovation ?
« La bande dessinée a beaucoup évolué », affirme Iman, vendeuse dans la librairie bruxelloise Multi BD. Particulièrement, dans les années 2000, l’apparition du « roman graphique » a fait l’effet d’un raz-de-marée. Quelle différence avec la bande dessinée ? « Aucune », selon la commerçante. Celle qui a écrit deux mémoires sur le sujet explique que le roman graphique, « c’est uniquement du marketing » : une manière de donner une image plus sérieuse à la BD. « Il y a autant de définitions de romans graphiques qu’il y a de clients », ajoute Iman.
Une stratégie payante
Et il faut dire que cette stratégie fonctionne : « tous les jours, ça attire des clients dans la boutique », rapporte la vendeuse. Pour Lou, grande consommatrice de livres, le roman graphique réunit les avantages du roman et de la BD classique : « les romans graphiques, c’est la bande dessinée en mieux, estime la juriste, les histoires sont souvent plus développées, et les intrigues plus denses ». Elle ajoute que « les illustrations apportent quelque chose en plus par rapport aux romans ».
Une cible plus large
« Les premières bandes dessinées publiées dans la presse étaient destinées à un public adulte, puis on s’est rendu compte que les gens les achetaient pour leurs enfants », raconte Iman. L’appellation « roman graphique » a permis de toucher un public plus large : petits et grands peuvent trouver un livre qui les intéresse puisque tous les sujets, même les plus sérieux, sont traités. La BD est d’ailleurs de plus en plus militante. Des écrivaines comme Pénélope Bagieu s’emparent de la question féministe pour produire des oeuvres engagées. Dans sa série Culottées, elle dresse le portrait de femmes « qui ne font que ce qu’elles veulent », qu’elles soient activistes, athlètes ou stars du rock.

Le coup de cœur de la libraire
Le Nirvana est ici – Mikaël Ross (2025) : « Un couteau, un doigt et des rollers » : c’est ainsi qu’Iman, libraire, résume son coup de cœur. L’action de cet ouvrage se déroule à Berlin, dans le pays natal de son auteur Mikaël Ross. Deux adolescents se retrouvent embarqués dans une affaire de trafic d’êtres humains, après avoir trouvé par hasard un doigt coupé dans un buisson. « C’est un polar qui mêle mystère, humour et poésie », décrit la professionnelle. Elle ajoute : « j’ai adoré la relation de la grand-mère, ancienne actrice devenue kleptomane, qui enseigne à l’un des personnages comment devenir un véritable agent 007 ».