À l’approche de l’hiver, la baisse de moral pousse certains Lillois à consommer pour se réconforter. Ce phénomène, appelé consommation émotionnelle, s’intensifie avec la dépression saisonnière. Entre stratégies marketing et fragilité psychique, l’achat devient parfois un refuge. Mais à quel prix, et avec quelle conscience ?
À Lille, l’arrivée de l’automne ne marque pas seulement le retour du froid : elle s’accompagne souvent d’une baisse de moral. Pour contrebalancer ses effets, certaines personnes achètent pour se sentir mieux. « Quand je suis stressée, je commande des vêtements ou des objets déco. C’est comme une récompense », confie Marie, 23 ans, étudiante. Ce comportement, appelé consommation émotionnelle, s’intensifie avec la dépression saisonnière, qui touche près de 5 % des Français chaque année selon l’Inserm.
Selon une étude européenne menée par Scalapay en juillet 2025, 42 % des Français déclarent acheter pour se réconforter, notamment en période de stress ou de solitude. Ainsi, 71% des acheteurs prévoient de dépenser plus qu’en 2024. Alors cette augmentation d’achat est-elle liée à la santé mentale ? À Lille, les professionnels de santé mentale observent cette tendance. « L’achat devient un exutoire, une manière de reprendre le contrôle quand tout semble flou », explique Camille D., psychologue.
Consommer mais à quel prix ?
Incitations commerciales, comparateurs, paiement fractionné… Tout est bon pour attirer le client comme le Buy Now Pay Later (paiement en plusieurs fois sans frais), particulièrement utilisé pour les achats impulsifs. On retrouve ce concept notamment dans la mode ou la beauté, secteurs privilégiés par respectivement 41% et 20% des Français. Deux univers ou l’image de soi et l’émotion jouent un rôle central… Les plateformes de e‑commerce amplifient ces achats compulsifs : suggestions personnalisées, promotions ciblées, livraisons express. « Je reçois des pubs à 23h, juste quand je suis seule. C’est là que je craque. », témoigne Mehdi, 26 ans, habitant de Fives. Une fragilité que les marques n’ignorent pas, bien au contraire : elles savent capter ces moments de faiblesse pour mieux séduire.
Mais dans un climat d’incertitudes, les arbitrages se durcissent. Le rapport European Consumer Sentiment du BCG (avril 2025) montre que 73 % des Français se disent inquiets de la situation politique et 70 % de la situation économique, des taux records en Europe. Pourtant, 61 % se sentent bien mentalement, révélant un paradoxe : un moral individuel stable dans un contexte collectif anxiogène. Dans cette phase politique et économique plutôt angoissante, l’achat devient aussi une échappatoire face à l’impuissance collective.
Acheter avec lucidité
À Lille, les Semaines d’Information sur la Santé Mentale ont mis en lumière ce lien entre fragilité psychique et comportements d’achat. Mais si le moral n’est pas au beau fixe, la conscience des Lillois, elle, reste intacte en élaborant des stratégies plus fines visant une consommation responsable. Les Français sont attachés à la qualité : 42 % refusent les marques distributeurs pour l’habillement, et 44 % prennent en compte la durabilité dans leurs achats, même si seuls 18 % sont prêts à payer plus pour un produit responsable.
À Lille, des associations comme La Clé des Champs ou Les Etincelles proposent des alternatives : journal émotionnel, groupes de parole, consommation consciente. « Il ne s’agit pas de culpabiliser, mais de comprendre ce que l’achat vient combler », conclut Camille D.