La Namibie a d’abord été colonisée par l’Allemagne jusqu’en 1915 puis par l’Afrique du Sud jusqu’en 1990. Un génocide a été commis par les forces allemandes et l’Afrique du Sud lui a imposé l’apartheid. Trente ans après la décolonisation, que gardent les Namibiens comme mémoires de cette histoire violente ? Tomas, Namibien de 32 ans témoigne.
Nous l’avons contacté par mail. « Je ne peux pas parler au nom de tous les Namibiens. Chaque personne a une histoire particulière avec le passé colonial. La colonisation nous a pris beaucoup de choses, en partie nos langues par exemple. Des peuples ont perdu leur langue et leur rapport au monde par la même occasion…»
« Je n’ai jamais haï les descendants des colons pour ce que leurs ancêtres ont fait. Mais globalement, je trouve que le pays est en paix avec son passé colonial. Je suis allé à l’école avec des Allemands » (c’est comme cela qu’il appelle les Namibiens allemands), « et tout se passait bien. Je ne les ai jamais haïs à cause de ce que leurs parents ou grands-parents ont fait. On trouve aussi encore beaucoup de bâtiments allemands, dont certains ont été récemment démolis par le gouvernement ».
Tomas poursuit : « L’histoire ne peut pas être changée. Énormément de personnes ont été tuées par le génocide, beaucoup de familles ont été endeuillées mais des pourparlers sont en cours pour avoir des réparations pour ce qui a été commis. »
Des stigmates encore présents
Trente ans après la décolonisation, la Namibie garde des traces de la période coloniale. « Les terres sont très chères, de plus en plus de Namibiens ne peuvent pas s’acheter de quoi cultiver leur nourriture, dans un pays où l’agriculture vivrière est encore largement dominante. Pas de terre signifie pauvreté. Mais des Allemands possèdent encore de grands terrains alors qu’ils ne vivent plus là, qu’ils sont retournés en Allemagne et les louent chers, condamnant des milliers de personnes à la pauvreté. »
« À l’école, ce qui nous est enseigné de la décolonisation, c’est comment le pays a lutté par deux fois pour son indépendance. » Pas d’amertume ou de ressentiment dans les propos de Tomas mais un espoir dans la reconstruction de son pays.