Au XVème siècle, la communauté Aztèque a connu la pire sécheresse de son existence durant deux ans. De récentes recherches scientifiques ont permis de faire un lien entre cet événement et le sacrifice de dizaines d’enfants au Dieu de la pluie, Tláloc, dans la région de Tenochtitlan.
Nous connaissons la civilisation Aztèque pour son architecture complexe et sa connaissance avancée du monde, mais aussi pour ses sacrifices humains. Permettant de libérer le « tonalli », une énergie vitale pour l’être vivant, ce rite de la communauté Aztèque était courant et essentiel à leurs croyances. Mais, si la plupart des sacrifiés étaient des esclaves ou des prisonniers de guerre, une récente découverte a permis l’identification d’une offrande massive d’enfants au Dieu de la pluie, Tláloc. C’est l’Institut National d’Anthropologie et d’Histoire (INAH) du Mexique qui révèle, dans un communiqué du 11 novembre, les clichés des dépouilles. Alors, pourquoi les Aztèques ont-ils sacrifiés leur progéniture au nom d’un Dieu ?
De l’eau pour les enfants, du sang pour les Dieux
En 1978, le « Projet Templo Mayor » a débuté et a permis aux archéologues de découvrir des ruines et des restes humains proche du « Grand Temple », situé dans la région de Tenochtitlan, ancienne capitale Aztèque. Sur un site de fouilles d’1,2 hectare, une fosse commune contenant les ossements de 42 garçons et de 6 filles, âgés de deux à sept ans, est alors excavée. Le projet archéologique, encore en cours et qui se terminera en fin d’année, a récemment déterminé des éléments historiques majeurs sur cette découverte.
En effet, l’étude des ossements et de la géologie régionale a d’abord permis de dater l’inhumation des corps, qui a donc eu lieu au milieu du XVème siècle. La construction du fameux temple datant du règne de Moctezuma, dirigeant Aztèque de ‑1440 à ‑1469, les scientifiques ont rapidement fait le lien entre le sacrifice et la grande sécheresse de deux ans qui a touché le bassin du Mexique. Par ailleurs, l’étude a également identifié une maladie causée par la malnutrition infectant la moitié des corps retrouvés dans la fosse, l’hyperostose porotique, l’une des conséquences dévastatrices de la sécheresse.
Bien qu’en avance sur leur temps, les Aztèques étaient encore en cours de développement concernant les systèmes d’irrigation et d’agriculture et dépendaient ainsi majoritairement de la pluie. La sécheresse, survenue juste avant une canicule, et les gelées automnales ont détruits les cultures, asséchant les plantes et attaquant le maïs, et ce de 1452 à 1454 avant J.-C. Leonardo López Luján, chef du « Projet Templo Mayor » évoque cet événement marquant pour le peuple : « La combinaison de ces deux phénomènes a détruit les récoltes et conduit à une situation de famine prolongée ». Cette perte massive des vivres a donc menée à une grande famine dans la région Aztèque et à un désespoir accru.
Survivre demande des sacrifices
La famine qui a fait rage pendant au moins deux ans a contraint certaines familles à vendre leurs enfants au gouvernement afin qu’ils servent d’offrandes au Dieu de la pluie, des tempêtes et de l’eau. Dans les croyances aztèques, les enfants représentaient la pureté, la fertilité et le renouvellement et étaient donc les meilleurs Tlaloques, serviteurs de Tláloc, pour amener la pluie sur les terres aztèques.
Grâce aux faits déjà connus de la culture aztèque et aux objets retrouvés dans les tombes, les scientifiques ont également pu reconstituer le rituel de sacrifice. En plus des restes de récipients cassés pour imiter le tonnerre et inviter la pluie à tomber, les archéologues ont pu trouver toute sorte d’offrandes jonchant le sol. Parmi ces dons, ils ont pu déceler des pigments bleus, des fruits secs, du matériel marin et onze sculptures représentant Tláloc. Mais ce n’est pas tout, le peuple Aztèque avait aussi soigneusement disposé les corps des enfants dans des boîtes en pierres taillées et déposé des ornements ou des pierres vertes dans la bouche des sacrifiés.
Ce rituel n’a pas seulement servi à implorer Tláloc, mais aussi à réduire le nombre de bouches à nourrir. La mort des 48 enfants a permis à la communauté Aztèque de la région de Tenochtitlan de survivre quelques temps. Cependant, elle a fini par déserter les terres, en raison d’un gouvernement affaibli par la crise et forcé de procéder à un exil massif de sa population.