Le secteur de la petite enfance fait face à un manque de personnel considérable. Salaires médiocres et heures de travail épouvantables : ces métiers n’attirent plus.
Il est 7 heures, les enfants commencent à arriver. Pour la directrice de la crèche « Rigolo Comme La Vie », c’est un moment délicat, car les petits ont du mal à se séparer de leurs parents. Mais le plus grand problème reste le manque d’employés. « Nous avons 20 enfants et seulement 3 éducateurs : ce n’est pas assez. Ce qui manque le plus, c’est un infirmier et un autre éducateur spécialisé. »
« Rigolo Comme La Vie » fait tout pour garder ses employés. Quinze jours de RTT, des cartes cadeaux de plus de 150 euros en plus de garantir une évolution de carrière au sein du groupe. Malgré cela, l’établissement peine à recruter. La loi pourrait-elle y changer quelque chose ?
Interrogée à ce sujet, la directrice est pour la réforme qui permet maintenant aux personnes sans diplôme de travailler avec des enfants. « Lorsque la loi est passée, nous avons immédiatement reçu un manuel professionnel avec toutes les instructions pédagogiques pour les nouveaux arrivants et tout a été mis en place pour les recevoir », précise t‑elle.
Mais en dehors des établissements privés, le problème est bien pire. Rut, qui a travaillé pour une micro crèche à Lille, dénonce le mauvais ratio entre le nombre d’enfants et d’encadrants : « Mon employeur ne payait pas ses employés correctement et l’hygiène de la structure était insalubre. »
Rut a d’ailleurs dû démissionner, après un grave accident impliquant un enfant.
Éducateur spécialisé : une formation chère, qui n’attire plus
D’après la Caisse nationale des allocations familiales, 48,6% des 8000 établissements déclarent un manque de personnel auprès des enfants. Un arrêté pour combler la pénurie des professionnels de la petite enfance à été mis en vigueur. Il autorise les crèches à recruter des salariés non diplômés (et non qualifiés) pour faire face à cette pénurie de main-d’œuvre. Une décision qui fait polémique.
Malgré de nombreuses tentatives pour attirer des nouveaux candidats, les professionnels peinent à convaincre.
Sylvia Valentin est la directrice du Centre Régional de Formation des Professionnels de l’enfance à Lille. « Le gouvernement a essayé d’investir davantage dans les crèches, mais le fait est que ce travail n’attire pas les gens. La formation coûte 6000 euros par an, peu de gens peuvent se le permettre. »
Marielle, une des enseignantes, raconte : « nous faisons de notre mieux, nous sommes présents aux forums, nous allons dans les lycées afin d’attirer de nouveaux candidats, mais chaque année ces derniers sont de moins en moins nombreux. » Pour Sylvia Valentin le problème est plus profond que cela : « c’est un métier que l’on fait parce qu’on l’aime. Il demande de savoir travailler avec les autres, de communiquer correctement et d’avoir beaucoup de patience ». En 2021, ils ont reçu 500 candidats, contre seulement 280 en 2022.