Dans les rues de Bruxelles se mélangent des bâtisses aux devantures design et colorées. Témoin d’un héritage architectural riche de deux courants artistique à la croisée du XIXe et du XXe siècle, ces maisons Art nouveau et Art déco respirent aussi la lutte ouvrière.
Maxime Abou Tara, résident bruxellois, a la chance de vivre depuis quatre ans dans un immeuble loin d’être banal : une bâtisse Art déco datant de 1925, conçue par Alfred Chambon, formé à l’Académie des beaux-arts de Bruxelles. « C’est l’un des rares bâtiments design de la rue », souligne Maxime. « Les autres datent des années 1970 sont sans intérêt, fruits de la bruxellisation, ce plan d’urbanisation qui a modernisé la ville au détriment des quartiers populaires et de l’art ». Mais dans d’autres quartiers, les façades aux designs peu communs pullulent, témoins de l’héritage architectural riche de la ville. On y trouve des maisons Art nouveau, mouvement artistique né à Bruxelles en 1893, et Art déco, qui s’est propagé en Europe à partir des années 1910.
Art nouveau ou Art déco ?
Quelle est la différence entre ces deux courants ? « L’hôtel Tassel, conçu par Victor Horta, est le point de départ de l’Art nouveau, qui se caractérise par sa rupture avec les lignes droites du classicisme. L’architecte souhaitait apporter de la couleur et de la nature dans les maisons, en s’inspirant des formes végétales et en laissant entrer la lumière », explique Aurélie Ranalli, architecte d’intérieur. « L’Art nouveau a été rapidement supplanté par l’Art déco, un style plus géométrique et moins coloré, détaille Aurélie. Il a été importé en Belgique par Josef Hoffmann avec sa conception du palais Stoclet entre 1905 et 1911 ». L’immeuble de Maxime, avec sa porte géométrique et motifs représentant des chardons en est un parfait exemple.
Un projet ambitieux pour le peuple
Fin 1899 Victor Horta achève la Maison du Peuple, commanditée par le Parti ouvrier. Le lieu répond à un double objectif : offrir un vaste espace de rassemblement aux travailleurs et célébrer le talent des artisans. « Il a insufflé à la Maison du Peuple une esthétique révolutionnaire, en privilégiant des formes fluides et des matériaux tels que le fer forgé, le verre et le sgraffite*, créant une impression de légèreté et de modernité. Les façades Art nouveau et Art déco incarnent aussi une vision d’un art accessible à tous », raconte Aurélie. La destruction de la Maison du Peuple en 1965, dans le cadre de la « bruxellisation », a marqué une perte pour le patrimoine architectural belge. Bien plus qu’un bâtiment, c’était un symbole de l’émancipation ouvrière et du pouvoir transformateur de l’art.
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* Technique décorative employée principalement dans l’architecture et la céramique.