C’est depuis leur pupitre que les élèves assisteront, dès la rentrée de septembre, à leurs premières sessions d’introduction à la sexualité. Le projet EVARS, pensé par Élisabeth Borne, ministre de l’Éducation nationale, est malmené par la controverse. Voté par l’ensemble des membres du Conseil supérieur de l’éducation ce 30 janvier, il ne fait cependant pas l’unanimité auprès des acteurs de l’enseignement.
Depuis fin janvier 2025, l’application prochaine d’un programme d’éducation à la sexualité est l’épicentre de vifs débats au cœur de la sphère éducative, tant du côté des parents d’élèves, inquiets, que celui des enseignants, perplexes, par l’émergence de cette mesure gouvernementale controversée. Révisé par l’actuelle ministre de l’Éducation nationale, Élisabeth Borne, le projet EVARS, aussi dénommé programme sur l’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle, a été adopté par le Conseil supérieur de l’éducation le 30 janvier dernier, à l’unanimité des voix.
Cette version repensée instaure définitivement trois séances échelonnées sur l’année, dictées par la loi de 2001, dans l’ensemble des établissements scolaires publics et privés, de la maternelle (3 ans) à la classe de terminale (18 ans), dès septembre 2025. Félicitée par les applaudissements des représentants, l’adoption du programme subit toutefois quelques turbulences en-dehors de la salle d’audience, entre enthousiasme mitigé et désapprobation radicale.
Un programme réactualisé aux nombreuses zones d’ombre
D’emblée, l’embryon du programme suscite de nombreuses réflexions et interrogations : n’outrepasse-t-il pas la sphère privée et éducative ? L’institution scolaire est-elle légitime, et suffisamment qualifiée pour inculquer des notions sexuelles, et ce, dès la maternelle ? Comment forme-t-on des enfants et adolescents à l’éducation sexuelle ? Est-ce la voie tracée à l’apprentissage d’une sexualité normée, codifiée ? Comment et par qui sera appliqué le déroulé théorique lors des séances d’apprentissage ?
Parmi les questions laissées sans réponse ferme, des incohérences se glissent entre les lignes du programme : l’asexualité (ressentir pas ou peu d’attirance sexuelle) et l’intersexualité (naître avec des caractéristiques biologiques ne correspondant pas aux définitions normées des corps féminins et masculins) ont été gommées des sessions d’encadrement, ou tout du moins repoussées dans le dernier cas. En effet, l’intersexualité ne sera pas abordée avant le lycée alors qu’elle figurait en CM2 dans la précédente version, quand l’asexualité ne répond pas présente à l’appel. Incompréhensible pour un projet de loi éducatif qui prône l’égalité dans le traitement de toutes les formes de sexualité.
L’apologie de la théorie du genre avancée par les associations
L’Éducation nationale promet cependant l’élaboration d’un programme neutre, objectif et équilibré au service exclusif des élèves, qui serait expurgé de tout biais idéologique. Il n’aurait pas été conçu comme un outil déguisé pour servir un militantisme. Or, l’approche adoptée dans l’adaptation du programme serait fondée, selon les associations détractrices du projet de loi, sur l’idéologie ou théorie du genre. Il s’agit d’une perspective propre à une sociologie militante critique des rapports hommes-femmes au sein de la société.
Toujours selon ces associations, cette idéologie ne serait jamais explicitement soulevée dans le programme, qui prévoit une déconstruction des stéréotypes, normes sociales inégalitaires et discriminations, en faveur d’une éducation à l’égalité des sexes. « Le projet EVARS considère la biologie, non plus comme un héritage scientifique, mais une opinion genrée et sexuée. Finalement, elle se substitue à une construction sociale. Quant à l’égalité, elle cesse d’être une valeur fondamentale de la République pour se comporter en injonction », nous confie Le Syndicat de la Famille, une des six autres associations conservatrices à avoir présenté un recours en justice devant le Conseil d’État, le 21 février dernier, pour précipiter l’annulation du programme dans les écoles. En novembre 2024, la prédécesseuse d’Élisabeth Borne, Anne Genetet, répondait aux critiques avant la présentation du projet finalisé aux organisations syndicales, en décembre dernier : « La théorie du genre n’existe pas, et elle n’existe pas non plus dans le programme ».