À Lille, une pétition circule afin que la préfecture et la ville réagissent face aux problèmes de drogue et de prostitution. Beaucoup se plaignent, mais rares sont ceux allant à la rencontre des personnes concernées. Pourquoi et comment en arrive-t-on à vendre son corps ? Mihai, travailleur du sexe, nous raconte son histoire.
Né en Roumanie et issu d’une relation consanguine entre un frère et sa soeur, Mihai n’était pas désiré. Abandonné puis envoyé en France, il a été adopté lorsqu’il avait 7 ans. À la recherche de ses origines et de son histoire depuis son plus jeune âge, sa vie n’avait déjà pas très bien commencé. « J’ai été rejeté de toute la société. Mes parents biologiques m’ont laissé, et ma mère adoptive non plus ne m’a jamais aimé », témoigne-t-il.
Abusé sexuellement à de nombreuses reprises durant son enfance, l’homme se lance dans la prostitution dès ses 16 ans. Si beaucoup le font pour l’argent, lui le fait pour une tout autre raison : obtenir de l’affection. « Ça me valorise, ça me permet de voir que je plais aux hommes. Je cherche de la tendresse, j’aime savoir que je suis désiré », explique-t-il avec un sourire timide dessiné sur les lèvres. « J’adore donner du plaisir et en recevoir. Au final, c’est un peu comme une personne qui va se faire un bon resto »…
En 20 ans de prostitution, l’homme a connu plus de 500 conquêtes. « J’en ai eu 512 pour être précis. Je les compte parce que ça me donne de l’importance ». Malgré son choix de vie difficile, Mihai a conscience des dangers de la rue, et de ceux engendrés par l’échange de faveurs sexuelles. Atteint du VIH, il tient à sensibiliser les jeunes prostitués : « Il faut bien se protéger et s’éduquer sexuellement. Moi je n’ai pas eu cette chance, j’ai dû apprendre par moi-même. C’est important de connaitre les risques avant de commencer », raconte-t-il.
À l’heure actuelle, l’homme de 36 ans continue de monnayer son corps. Selon lui, la prostitution est un moyen d’oublier le passé, et de continuer à avancer. Il me confie, les yeux remplis de larmes : « ma place est ici. Je ne veux pas arrêter. Je cherche juste à être comme tout le monde ; à être aimé et intégré dans la société »…