Il s’agit du plus gros exercice auquel vont participer les armées françaises depuis la fin de la guerre froide. Débuté le 16 février 2023, l’exercice Orion 23 est entré dans sa deuxième phase. Cet exercice a pour objectif de mobiliser des forces militaires sur le territoire. Dans quel but ? On fait le point.
Des moteurs qui ronronnent, des avions prêts à habiller le ciel et des milliers d’hommes qui se suivent. Voilà comment peut se décrire l’exercice Orion. Inspiré d’un scénario développé par l’OTAN et décidé en 2020, Orion a pour mission de renforcer la préparation opérationnelle interarmées. Une instruction de grande ampleur qui a pour but de renforcer les armées entre elles mais également de montrer l’efficacité de ces dernières au cas où elles devraient s’engager sur demande de l’Alliance.
Orion face à Mercure : le chasseur contre le voleur
On pourrait penser que la dénomination d’Orion pour cet exercice n’a pas été choisie par hasard. Dans la mythologie grecque, Orion était connu pour être un chasseur et un combattant hors-pair. Et pour offrir un apprentissage de qualité, tout un scénario fictif a été établi.
La France compte de nombreux alliés, y compris un certain pays du nom de Arnland. Depuis plusieurs mois maintenant, Arnland est en proie à des déstabilisations orchestrées par un État frontalier extrêmement puissant : Mercure. Rappelant la divinité romaine, connu pour sa ruse et son rôle de patron des voleurs et sournois, Mercure n’est pas une force à prendre à la légère. Disposant de ressources militaires importantes, l’État hostile possède également l’arme nucléaire. La menace est grande sur Arnland et sur la stabilité géopolitique déjà assez fragile. Accompagnée de forces étrangères (européennes et américaines), l’Armée française doit prendre la tête d’une coalition multinationale. L’objectif : empêcher Mercure d’assouvir ses désirs. A savoir prendre le contrôle d’Arnland et priver ses habitants de leur liberté.
Orion 23 : une manœuvre divisée en quatre séquences
Si le géant grec Orion était connu pour son imprévisibilité et son tempérament de feu, l’exercice qui porte son nom a préféré la minutie des détails. Il peut se diviser en quatre étapes, toutes aussi importantes les unes que les autres.
En mai 2022 débute la première étape. Intitulée « planification opérationnelle », elle a pour but de mettre en place les trois séquences qui suivront pour assurer le bon déroulement de l’exercice et plus particulièrement de la seconde séquence qui vient de débuter. Baptisée « entré en premier », elle prend place dans le sud de la France (Hérault et Occitanie). Elle a pour objectif de déployer les forces dites de réaction rapide, quel que soit le domaine (terre, mer, air, spatial et cyber). Cette manœuvre prendra fin début mars pour laisser place à la troisième phase d’Orion.
Nommée « travaux civilo-militaires », cette phase s’adressera davantage au personnel bureaucratique et ministériel. Rappelant l’importance cruciale des prises de décisions dans un contexte de crise comme les scénarios de 12 hommes en colère (1957) ou Treize jours (2000), cette phase mettra les autorités politiques à rude épreuve. Elles devront adapter leurs choix quant à la situation, notamment pour le bien des civils. Cette phase s’achèvera vers fin mars avant de laisser place à l’action.
La quatrième séquence appelée « opération d’envergure » sonnera le glas de plusieurs mois de préparation. Les forces engagées dans ce conflit fictif s’élanceront dans un affrontement contre les forces ennemies. Elles devront prendre le dessus sur deux zones de combats : la terre et le ciel. L’opération se déroulera entre mi-avril et début mai.
Un écho à la volonté présidentielle
Orion 23 n’est pas seulement un exercice de grande envergure mis en place par l’État major des armées. Il s’agit du commencement d’un grand programme, de nature triennal, qui vise à renforcer la cohésion interarmées. L’exercice entre parfaitement en symbiose avec la volonté d’Emmanuel Macron, celle de renforcer et préparer au mieux les forces françaises pour l’avenir. Lors de ses vœux à Mont-de-Marsan dans les Landes le 20 janvier dernier, le président avait rappelé son souhait de consolider ses armées dans un but préventif et sécuritaire. Étant désormais la principale puissance militaire sur le continent européen depuis le départ du Royaume-Uni, la France doit affirmer sa place forte dans le domaine de la défense, d’autant plus au vu du contexte actuel.
Cette volonté se traduit par conséquent par la volonté d’augmenter le budget destiné aux armées par la loi de programmation militaire (LPM). Mais aussi par les accords entre différents pays, notamment le projet SCAF avec l’Allemagne et l’Espagne et par la mise en place d’exercices de grande envergure comme Orion 23. Désormais engagé d’une certaine manière contre la Russie avec l’envoi de matériels et de véhicules militaires pour soutenir l’Ukraine, l’État-major des armées semble vouloir personnifier les propos qu’avait tenu le chef d’État devant la base aérienne de Mont-de-Marsan par le biais d’Orion, à savoir « avoir une guerre d’avance ».