La mobilisation « Bloquons tout » a viré à l’affrontement dans le centre-ville de Lille. Entre slogans, gaz lacrymogènes et vitrines brisées, la journée a laissé une odeur âcre et un goût amer.
Ils étaient venus par milliers ; 40 000 selon la CGT, 8 500 selon la préfecture. Pour la grande majorité, l’intention était nette : manifester sereinement, avec la conviction que la rue reste un espace démocratique. Certains en famille, d’autres en fauteuil roulant, tous serrés les uns contre les autres dans un centre-ville paisible au départ. « Au début, ça se passait bien », assure Isaure, étudiante en sociologie. « Et puis la police a commencé à gazer et à nous arroser d’eau pour que ça colle. » Plus loin, Pavel, la vingtaine, résume la frustration d’une génération : « On est là à cause du contexte actuel, on a grandi avec Macron ! » Excédé, il lâche : « Ça gazait pour rien ! »

Des violences bien présentes
Pourtant, certains manifestants ont bel et bien choisi l’affrontement, multipliant dégradations et violences. L’air s’est chargé d’une fumée dense, portée par les flammes des poubelles renversées. Des palissades arrachées, des voitures dégradées, les façades des banques recouvertes de tags rageurs… Lille a changé de visage en quelques minutes. Des agences immobilières ont découvert leurs vitrines brisées, à l’instar de celles de l’emblématique Printemps. Dans ce chaos, les chevaux de la police ont chargé, dispersant une foule suffocante sous les gaz lacrymogènes.

Entre espoir et désillusion
« La colère est légitime », nous a affirmé Karine Trottein, la secrétaire de la Fédération Nord du PCF. Puis elle a nuancé : « On était là pour une manif pacifiste et on n’accepte pas la tournure que ça prend. C’est pas ce qu’il faut retenir de cette journée ! ». Au total, douze personnes ont été interpellées dans la capitale des Flandres selon la préfecture, qui se félicite d’avoir œuvré pour la « sécurité de tous ». 450 membre des forces de l’ordre avaient été mobilisées autour du cortège lillois. Le ministre de l’Intérieur démissionnaire, Bruno Retailleau, avait annoncé lundi soir avoir sollicité 80 000 policiers et gendarmes dans l’ensemble du pays.
