Agriculteur depuis une quinzaine d’années, Gaëtan de Villaine est aujourd’hui sur le point de réaliser l’un de ses rêves en tant que producteur : fabriquer et vendre ses propres pâtes. Pour parvenir à accomplir ce projet, l’auto-entrepreneur de 44 ans a dû partir de zéro. Enfin presque. Les aliments qu’il veut vendre, pâtes, farine et huile, il en cultive les matières premières. Son but avec Artisan des Champs, « aller jusqu’au bout de son produit ».
Je ne vends plus uniquement mon blé, je vends maintenant mon sachet de pâtes.
D’où vous est venu cette idée de vendre vos propres produits transformés ?
Etant agriculteur et produisant des matières premières comme du blé, du tournesol, du soja, j’ai toujours été assez frustré de ne jamais aller jusqu’au bout de mon produit et de le vendre en brut. Je ne vends plus uniquement mon blé, je vends maintenant mon sachet de pâtes. Je me suis lancé dedans en sachant que depuis quelques années, l’alimentaire était en train de devenir un bon terrain d’investissement. D’ailleurs, la farine, les pâtes et l’huile sont les trois produits dont le prix a le plus explosé ces derniers temps.
Quels ont été les enjeux, les difficultés et même les peurs avant de vous lancer ?
Ce qui me freinait, c’était le budget total du projet, le temps qu’il faut dégager. Les normes pour pouvoir transformer des produits alimentaires sont assez colossales. C’est un projet qui me coûte 200 000 euros, qui va me coûter 1000 euros par mois d’emprunt pendant 10 ans. Si je veux un bénéfice, sans compter la main d’œuvre, il faut que je vende pour plus de mille euros par mois de pâtes. Je compte embaucher en fin d’année, donc je vais devoir vendre pour minimum 3000 euros par mois. Malheureusement je ne sais pas encore combien je vais vendre mon paquet de pâtes, parce qu’avec la guerre en Ukraine, les prix sont en train de s’envoler, donc ils sont plus forts que mon étude de marché. D’un autre côté, certaines charges vont augmenter, qui elles, n’étaient pas dans mon étude de marché non plus. Par exemple, le prix de l’électricité, le prix des bouteilles, sachets de farine, etc. Une autre de mes craintes, dans ce projet, c’est que je ne suis pas le seul. Dans les 100km aux alentours, un autre agriculteur, qui a commencé il y a 7 ou 8 ans, fait la même chose. La grande différence, c’est que moi c’est bio.
A l’avenir, comment envisagez-vous votre entreprise ?
Ce projet, en y passant une journée par semaine pendant 10 ans, ça me rembourse mon emprunt. Si je me mets à devoir travailler plus d’une journée par semaine, alors j’embaucherai. J’avais l’objectif d’acheter une petite boutique en ville, mais on ne va pas se lancer dans ce projet maintenant. Je vais commencer par des pâtes sèches à base de blé dur, de sarrasin et d’épeaûtre, et quand je serai bien lancé je ferai des pâtes fraîches avec les œufs que je produis également. Après je pourrai faire de l’entreprise : si quelqu’un veut que je lui fasse de l’huile de noix, il n’aura qu’à me fournir ses noix. J’aimerais trouver plusieurs distributeurs comme des grandes surfaces, des Biocoop. En bio on achète et on vend dans sa région. Géographiquement, je vise l’Auvergne, parce que si je m’étends, ça veut dire transport, pollution, carbone, etc. Mon but en termes de distribution c’est un tiers de grandes surfaces, un tiers de vente sur place ou sur internet et un tiers en Biocoop.
La fabrication de vos produits n’est pas encore lancée, qu’est-ce qu’on attend ?
D’ici deux mois, tout sera en route. Il ne reste plus qu’à installer les machines, à suivre une formation auprès de l’entreprise qui me les a vendues et on pourra démarrer !