Ce week-end, l’Usine à Roubaix a accueilli l’événement Sneakers Corner. Des milliers de modèles de baskets étaient à vendre, des plus classiques aux plus exclusifs : de quoi ravir les collectionneurs qui sont de plus en plus nombreux. Décryptage d’un phénomène en grande pompe.
Ces samedi 18 et dimanche 19 janvier, une cinquantaine de stands et des milliers de paires de baskets ont pris leurs quartiers à l’Usine à Roubaix pour « le plus grand événement gratuit dédié aux sneakers en Europe », selon les organisateurs. Les passionnés venus agrandir leurs collections ne sont pourtant pas des sportifs. Auparavant simple chaussure de sport, la sneaker est devenue un véritable objet de la pop culture. Plus qu’une mode, c’est un phénomène de société qui représentait 3 milliards d’euros de ventes en France en 2021.
Sortir du lot
L’engouement démarre dans les années 1970 et 1980 aux États-Unis dans le milieu du hip-hop. La sneaker devient peu à peu un objet de mode et les rappeurs en deviennent les premières égéries. Au fil des années, les baskets sont moins prisées pour leur confort ou leur aspect pratique que pour leur esthétique. « Je trouve ça vraiment beau, c’est une pièce à part entière pour s’habiller qui fait toute une tenue », explique Sacha, 18 ans, qui collectionne les paires depuis deux ans. Au-delà de l’esthétique, la sneaker est également un moyen pour la personne qui la porte d’affirmer son identité et de se démarquer. « Ce que je recherche quand je choisis une paire, c’est de pouvoir « sortir du lot », de ne pas avoir la même paire que tout le monde », affirme l’étudiant en langues.
Le juteux marché de la revente
Or, c’est précisément cette quête de singularité qui explique les prix démesurés que certaines paires peuvent atteindre. La quantité de produits est volontairement limitée afin de créer un sentiment d’exclusivité. En plus d’avoir le plaisir de posséder un objet rare, les fans tentent parfois de réaliser une plus-value. Ils adoptent des pratiques spéculatives en investissant sur des modèles produits en exemplaires très limités : ils espèrent que la paire prendra de la valeur après sa sortie, à la manière d’une œuvre d’art ou d’un sac de luxe. Ainsi, si beaucoup achètent neuf, le marché secondaire de la sneaker connaît une grande popularité. Les collectionneurs écument les sites de revente spécialisés comme StockX, ou les plateformes comme Vinted, dans l’espoir de trouver le modèle qu’ils n’ont pas réussi à obtenir lors de la vente initiale. Ces sites proposent souvent des chaussures deadstock, c’est à dire jamais portées et conservées dans leurs conditions d’origine. En effet, certains sneakerheads ne portent pas leurs trouvailles et préfèrent les exposer.
Les dix sneakers les plus iconiques* :
- Nike Air Force 1
- Adidas Superstar
- Nike Dunk
- Air Jordan 1
- Vans Old Skool
- Adidas Samba
- Nike Air Max 97
- Converse All Star
- Adidas NMD
- Adidas Stan Smith
*basé sur le nombre de recherches Google et de hashtags sur Instagram de tous les temps
Le business des collaborations
En fonction de leur rareté, les paires de sneakers peuvent atteindre des prix exorbitants. Sacha confie : « Mon budget maximum pour une paire est d’environ 350 ou 400 euros ». Pourtant, ce n’est rien à côté du prototype de Nike Air Yeezy 1 qui s’est vendu pour 1,8 million de dollars aux enchères en 2023, devenant la paire de sneakers la plus chère de l’histoire. Ce modèle avait été dessiné par le rappeur Kanye West. Il faut dire que les collaborations sont monnaie courante dans le monde de la sneaker. Artistes, maisons de mode, marques : tout est possible. Parmi les collabs les plus marquantes, on peut citer Nike qui s’est associé à la marque de crème glacée Ben & Jerry’s, mais aussi au rappeur Travis Scott. Le caractère exclusif et souvent très limité de ces modèles font grimper leurs prix. Ces collaborations ont également permis, au fil des années, de placer la sneaker au carrefour de plusieurs univers comme la mode, la musique ou le cinéma, et ainsi faire d’elle un objet ancré dans la culture populaire.
Lexique de la sneaker
L’univers de la sneaker est empreint d’un langage bien particulier, issu de l’anglais.
Traduction :
- Drop : sortie d’un modèle en édition limitée ;
- Sneakerhead : personne passionnée par les sneakers ;
- Cop : acheter une paire convoitée ;
- Resell : revente de sneakers, souvent à un prix plus élevé que le prix initial ;
- Deadstock (DS) : une paire de sneakers jamais portée, conservée dans son état d’origine avec la boîte d’origine ;
- Heat : une paire de sneakers très prisée et populaire ;
- Collab : collaboration entre une marque et un artiste, designer ou autre marque, souvent synonyme d’exclusivité ;
- Raffle : tirage au sort permettant d’acheter une paire limitée ;
- Brick : une paire qui ne se revend pas bien ou qui perd de sa valeur après sa sortie ;
- Custom : sneakers personnalisées, modifiées à la main pour un design unique ;
- Beater : une paire de sneakers portée régulièrement, parfois abîmée ;
- Colorway : les couleurs et le design spécifiques d’un modèle de sneaker.